Fiction donne la part belle à cet "insolite" complémentaire aux genres fantastique et science-fiction dans ce numéro 111. On pourra particulièrement y apprécier la novella de Cyril Kornbluth, "Le moindre des fléaux", que les éditions Denoël ne republieront que 20 ans plus tard dans la collection éphémère "Etoile double" et désormais un peu difficile à trouver. Simak emporte la part du lion, dans un cortège d'histoires plus déroutantes les unes que les autres.
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Dagon se métamorphose ! |
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Sommaire du Numéro 111 :
1 - (non mentionné), Nouvelles des auteurs de ce numéro, pages 2 à 3, bibliographie
2 - Cyril M.KORNBLUTH, Le Moindre des fléaux (Two Dooms, 1958), pages 7 à 55, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH
3 - Theodore L. THOMAS, L'Examen (Test, 1962), pages 56 à 59, nouvelle, trad. Elisabeth GILLE
4 - Clifford D. SIMAK, La Vermine de l'espace (The Golden Bugs, 1960), pages 60 à 94, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH
5 - Pierre VERSINS, Les Habitants des autres planètes, pages 95 à 97, nouvelle *
6 - Avram DAVIDSON, Dagon (Dagon, 1959), pages 98 à 107, nouvelle, trad. René LATHIÈRE
7 - Jacques GOIMARD, L'Homme sans chronomètre, pages 108 à 115, nouvelle *
8 - Richard M. McKENNA, La Mort et le petit singe (Casey Agonistes, 1958), pages 116 à 126, nouvelle, trad. P. J. IZABELLE *
9 - Roland TOPOR, Un grand homme, pages 127 à 130, nouvelle
10 - Victor HUGO, Inferi, pages 131 à 135, poésie
11 - Pat MALLET & Michel PELTIER, La Vie privée du vampire (suite et fin), pages 136 à 139, bande dessinée
CHRONIQUES
12 - Jacques GOIMARD, Le Temps des coquins, pages 140 à 143, critique(s)
13 - Fereydoun HOVEYDA, « Ils » sont parmi nous, pages 145 à 145, article
14 - COLLECTIF, Ici, on désintègre !, pages 147 à 163, critique(s)
15 - Jacques GOIMARD, Place aux barbus ! / Les hallucinés de l'autocar, pages 165 à 171, article
16 - (non mentionné), En bref, pages 172 à 173, article
17 - COLLECTIF, Tribune libre, pages 174 à 176, article
* Nouvelle restée sans publication ultérieure à ce numéro.
Autre novelette dans ce numéro : « La vermine de l'espace », où le toujours habile Clifford Simak sait exploiter à fond le thème d'une curieuse visite d'extra-terrestres sur notre planète.
Dans « L'examen », Theodore Thomas nous donne une étrange (et inquiétante) vision d'avenir, et Pierre Versins, dans « Les habitants des autres planètes », se livre à une fantaisie en multipliant par quatre l'histoire des risques qui attendent le futur explorateur des autres mondes.
Avram Davidson, auteur dont vous reverrez souvent la signature, nous offre ensuite une nouvelle surnaturelle subtilement exposée : « Dagon ».
Les influences respectives de Kafka et de Borges transparaissent dans deux textes insolites français : « Un grand homme », de Roland Topor, et « L'homme sans chronomètre », première nouvelle de notre collaborateur Jacques Goimard (lequel s'est aussi souvenu de « L'année dernière à Marienbad »).
Cependant que l'auteur américain Richard McKenna évoque la vie de ces morts en sursis, les incurables d'un hôpital, dans un récit bizarre : « La mort et le petit singe » (où la mort intervient à la fois comme réalité psychologique et comme entité personnifiée).
Pour terminer, un Rayon des Classiques inattendu : un poème mal connu de Victor Hugo (nous nous expliquons, en le préfaçant, sur les raisons de ce choix).
Et en fin de numéro, outre nos rubriques habituelles, une chronique littéraire qui est ce mois-ci, exceptionnellement, une chronique des bandes dessinées.

Comme l'indique le titre, la bombe atomique fut Le moindre des fléaux face à l'obscurantisme nazi. Cyril M. Kornbluth nous fait voyager dans un futur immédiat où les forces de l'Axe auraient vaincus les Alliés, et exprime - peut-être un peu naïvement - le bond en arrière que le fascisme aurait fait faire à la civilisation. L'autrice Jacqueline Osterrath y réagira fortement dans le Fiction n°113.
L'examen est une courte nouvelle fort bien ficelée, avec son lot de rebondissements et ses surprises. On en sort comme "matrixé", comme on dit de nos jours, par le peu connu Theodore L. Thomas, collaborateur occasionnel d'Algis Budrys ou Theodore Cogswell.
Quel dommage que le titre français La vermine de l'espace en dévoile une peu trop, quand une traduction littérale du titre originel ("The golden bugs" est une mise au pluriel du titre d'une célèbre nouvelle d'Edgar Poe) aurait pu donner "Les scarabées d'or", voire "La vermine dorée". Quoiqu'il en soit, Clifford D. Simak prend son temps pour faire monter ses péripéties en mayonnaise, peut-être un peu trop parfois, mais on ne lui en tiendra pas rigueur, tant cela rend les personnages attachants, même s'ils sont un peu stéréotypés.
De la probable impossibilité de parvenir à communiquer avec des entités extraterrestres… Pierre Versins décline avec Les habitants des autres planètes la même situation autour de ce thème en quelques courtes prises de contact. Amusant.
Avram Davidson intrigue avec Dagon, une énigme faite de sensations : un Marine lors de l'occupation chinoise en 1945 tente de percer des mystères orientaux et devenir l'égal d'un Dieu.
Du style, un propos intriguant, une imagerie poétique… Manque peut-être à Jacques Goimard et à L'homme sans chronomètre un véritable sujet, car celui-ci, pour sembler borgésien, manque peut-être un peu de chaleur pour nous emporter tout à fait.
La mort du petit singe laisse perplexe. Sans doute sommes-nous passés à côté de cette histoire de gens (?) hospitalisés pour apprendre à mourir. Les péripéties sont peu claires, les personnages loin d'être mourants, bref, on finit par ne plus comprendre de quoi il est question dans cette histoire de Richard M. McKenna.
Roland Topor imagine comment la caste au pouvoir dresse ses agents, fabrique Un grand homme, dans un conditionnement infantilisant et cruel, et comme en vase clos. Très proche du style de Sternberg, on appréciera l'aspect moins psychologique que politique de son narrateur naïf et faussement victime.
Ce numéro termine sa partie littéraire par une très belle poésie inattendue de Victor Hugo, Inferi, décrivant des cortèges de planètes-bagnes. La rédaction va même jusqu'à faire de Hugo et de ce texte l'inventeur de la science-fiction !
Côté rubriques, une première Chronique des bandes dessinées, après le succès du Club mené par Francis Lacassin. C'est le toujours très prolixe Jacques Goimard qui s'y colle avec une belle critique de la bande-dessinée de Jean-Claude Forest, Barbarella.
Mais c'est surtout "La réponse de la bergère", comme on pourrait appeler la petite polémique lancée dans son numéro 108 par la rédaction de Fiction (par Alain Dorémieux ?), au sujet d'une pique assez gratuite lancée au passage par Marcel Battin, dans son fanzine, sur Nathalie Henneberg. Après les prises de position défensive, voici l'inévitable contre-attaque, le troisième round de ses échanges parfois âpres, parfois plutôt humoristiques, disséminés entre les rubrique "En bref" et "Tribune libre", avec un courrier de Michel Ehrwein himself !
Les épisodes précédents peuvent être lus dans notre article sur le n°110 de Fiction.
En bref
Le match Battin-Henneberg.
À la suite des protestations de lecteurs concernant son attaque de Nathalie Henneberg (voir notre Tribune Libre du mois dernier), Marcel Battin contre-attaque dans le numéro 6 de « Karellen-Orion » : « J'ai entrepris, avec toute l'objectivité dont je suis capable, la lecture de « Des ailes dans la nuit…» de Nathalie Charles-Henneberg. Mille regrets, mais je n'ai pas pu poursuivre au-delà de la cinquième page. Je ne puis donc revenir sur ce que j'ai écrit. »
Tribune libre
Lecteur assidu (mais souvent déçu) de votre revue depuis son premier numéro, je n'ai pris jusqu'à présent part à aucun de vos référendums ni à aucune controverse, un peu par paresse, un peu dans la conviction qu'une voix ajoutée ou retranchée à la majorité n'aurait pas grande importance.
Mais aujourd'hui, vraiment, l'occasion est trop belle :
Vous demandez à vos lecteurs ce qu'ils pensent de l'opinion de Marcel Battin dans « Karellen-Orion » sur Nathalie Charles-Henneberg.
Permettez-moi de vous dire que hautement, flegmatiquement et impavidement, j'approuve totalement Marcel Battin la bergère est plus qu'horripilante, elle est assommante, et son nom à rallonge ne cache que nullité et prétention. Elle gâche votre revue depuis trop longtemps et bien trop souvent. Délivrez-nous de ses élucubrations. Donnez-vous enfin de la « vraie » science-fiction ou du « vrai » fantastique, et non plus de ces contes à dormir debout pour poupons attardés. Abreuvez-nous de Jean Ray, Carsac, Matheson, Lovecraft, Heinlein, Brown, etc. Il ne manque pas de bons auteurs.
(M. Yves Cariou, Nice)
Malgré votre protestation, je dis « bravo » à M. Marcel Battin ! Mme Henneberg est effectivement horripilante… Un symbolisme obscur, un manque complet d'imagination, des aventures cycliques, n'ayant de rapport ni avec la science-fiction, ni avec le fantastique. Alors, de grâce, préservez-nous de Mme Henneberg qui est peut-être charmante dans la vie mais qui nous ennuie dans « Fiction ».
D'une manière générale, d'ailleurs, évitez les auteurs autres que les Anglo-Saxons, car, qu'ils soient Français, Allemands, Italiens, Russes ou Américains-Latins, leurs nouvelles sont mauvaises à 95 %. Et, personnellement, je préfère encore Theodore Sturgeon avec « Une fille qui en a », bien que la nouvelle soit un peu… écœurante – mais c'est quand même autre chose !
(Monsieur G. Romain, Cachan).
La Tribune Libre du numéro de janvier est pleine d'intérêt.
Tout d'abord, j'ai été agréablement surpris de constater qu'apparemment aucun lecteur n'a pris au tragique la hardiesse du sujet de la nouvelle de Sturgeon, au point de crier au scandale et d'en méconnaître la très grande qualité. En passant, je regrette (mais personne n'y peut rien) que la langue française n'ait pu permettre une traduction littérale du titre anglais, qui serre de beaucoup plus près le sujet, s'il n'est pas aussi évocateur pour qui n'a pas encore lu l'histoire… Une fois de plus, Sturgeon nous a montré (m'a montré : je prends ici le risque d'émettre une opinion personnelle qui ne sera certainement pas partagée par tout le monde, oh ! non) qu'il est infiniment plus à son aise dans la nouvelle que dans le roman, où il (me) paraît toujours s'empêtrer un peu dans ses propres ficelles.
Puisque nous parlons d'opinions personnelles, un qui ne semble pas avoir eu de chance avec la dernière qu'il a émise, c'est Battin, en jugeant et condamnant Nathalie Henneberg. Quelle volée de bois vert il a reçue ! Entre nous, vous en avez fait un peu une cible à la vindicte publique, en reprenant dans vos pages une déclaration qui ne s'adressait qu'au petit cercle des lecteurs de « Karellen-Orion », lesquels en ont lu bien d'autres et apprécient justement chez Battin, même s'ils ne sont pas d'accord avec lui, sa franchise. Nul doute que s'il eût songé écrire pour « Fiction », il eût quelque peu développé son thème… « Grossièreté » (deux fois). « prétention », « envie » (deux fois), on lui en découvre des défauts, au confrère, en outre qualifié de « prophétaillon de bas augure » et de « masochiste systématique », et j'en passe…
Mademoiselle (ou Madame) Cassar, Marcel Battin n'a jamais eu l'intention de forcer qui que ce soit à « cesser de lire cet auteur » : il a simplement écrit qu'il ne l'aimait pas, et c'est bien son droit. D'autres pensent autrement, et c'est tant mieux pour Monsieur Boulestin, dont la lettre d'ailleurs est extrêmement intéressante, car elle peut être considérée comme un « test » pratiqué sur une portion du public, concernant l'audience de Nathalie Henneberg : devant les réactions qu'il cite dans sa lettre, on ne peut que les féliciter et les envier d'avoir, elle des lecteurs et lui des clients, aussi fidèles et aussi enthousiastes.
Mademoiselle (Madame ?) Bazin, je vais vous décevoir, mais, moi, ce sont des œuvres de Battin que j'ai gardé le souvenir le plus vif, en général, plus que de celles de Sternberg, à qui je trouve d'autres qualités. Quant à Barjavel, il est à placer bien au-dessus de ces deux-là, Jacques Van Herp vous a expliqué pourquoi bien mieux que je ne saurais le faire. Je ne veux pas discuter ici des qualités réelles et des défauts certains qu'offre, comme chacun de nous, Nathalie Henneberg ; simplement, attirer l'attention de Mlle Bazin sur la lettre de M. Huré. Que constate celui-ci, à propos du numéro où a paru « Des ailes, dans la nuit » ? Un excès d'« effroyable », et un manque de « sympathie », d'« émerveillement », de « fraîcheur », de « puissance poétique », de « raison dans la féerie »… un manque de ces qualités que vous pensez discerner chez l'auteur dont vous prenez la défense, précisément. Alors, pensez-vous toujours qu'il faut brûler Battin pour ses écarts de langage ? (...)
Michel Ehrwein
Rapport du PReFeG (Avril 2025)
- Relecture
- Corrections orthographiques et grammaticales
- Vérification du sommaire
- Vérification des casses et remise en forme des pages de titre
- Mise en forme des titres présentés in "Revue des livres"
- Ajout de la Table des "Nouvelles des auteurs de ce numéro" telle qu'évoquée dans le sommaire sur NooSFere mais n'apparaissant pas dans le epub d'origine.
- Notes (3b), (3c) et (10) ajoutées.
- Vérification et mise à jour des liens internes
- Mise au propre et noms des fichiers html
- Mise à jour de la Table des matières
- Mise à jour des métadonnées (auteurs, résumé, date d'édition, série, collection, étiquettes)
En cliquant sur les noms des auteurs de ce numéro
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