25 septembre, 2024

Fiction n°078 – Mai 1960

Un Poul Anderson demeuré inédit depuis la publication de ce numéro de Mai 1960 de Fiction, un Alain Dorémieux qui joue à cache-cache pseudo, et un lot de nouvelles SF (signées Sturgeon, Sheckley...) où l'on pressent déjà la mutation des grands thèmes, voilà de quoi se réjouir !

 

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Sommaire du Numéro 78 :

NOUVELLES
 


1 - Claude VEILLOT, Les Premiers jours de mai, pages 3 à 16, nouvelle

2 - Robert SHECKLEY, Retour aux cavernes (The Girls and Nuggent Miller, 1960), pages 17 à 27, nouvelle, trad. René LATHIÈRE

3 - Miriam Allen DEFORD, Dents pour dents (The Monster, 1960), pages 28 à 40, nouvelle, trad. René LATHIÈRE

4 - Anthony BOUCHER, Dialogue avec le robot (The Quest for Saint Aquin, 1951), pages 41 à 57, nouvelle, trad. René LATHIÈRE

5 - Victoria LINCOLN, Témoignage perdu (No evidence, 1958), pages 58 à 65, nouvelle, trad. Anne MERLIN *

6 - Pierre VÉRY, Le Yoreille, pages 66 à 79, nouvelle

7 - Theodore STURGEON, Le Singe vert (Affair with a green monkey, 1957), pages 80 à 89, nouvelle, trad. P. J. IZABELLE

8 - Monique DORIAN (aka Alain DOREMIEUX), Vers un autre pays sans nom, pages 90 à 104, nouvelle *

9 - Poul ANDERSON, Et s'il n'en reste qu'un... (The Last of the Deliverers, 1958), pages 105 à 117, nouvelle, trad. René LATHIÈRE *

10 - Isaac ASIMOV, Suivez les instructions (Insert knob A in hole B, 1957), pages 118 à 118, nouvelle, trad. Arlette ROSENBLUM 

CHRONIQUES


11 - (non mentionné), Notre référendum 1960 : Résultats du questionnaire de Mars, pages 119 à 121, chronique

12 - Demètre IOAKIMIDIS & Igor B. MASLOWSKI & Roland STRAGLIATI & Pierre VERSINS, Ici, on désintègre !, pages 125 à 132, critique(s)

13 - (non mentionné), Vu et lu…, pages 133 à 133, critique(s)

14 - COLLECTIF, Le Coin des spécialistes, pages 134 à 135, critique(s)

15 - F. HODA, Film sans utilité, pages 136 à 138, article

16 - JEAN-JACQUES, La Théorie unitaire de Jean Charon, pages 139 à 142, article

17 - Jacques BERGIER & Alain DORÉMIEUX, Aux frontières du possible, pages 143 à 144, chronique


* Nouvelle restée sans publication ultérieure à ce numéro.


Les premiers jours de mai, par Claude Veillot (auteur déjà publié dans l'anthologie Fiction Spécial n°1) est une histoire d'invasion extraterrestre sinistre à souhait.

Retour aux cavernes répond assez à la nouvelle précédente sur l'isolement des "survivants post-apo". Ici, Robert Sheckley laisse supposer que la guerre originelle, la première mais aussi l'ultime, est la guerre des sexes. 

On appréciera particulièrement le savoir-faire de Miriam Allen deFord qui sait mener ses effets jusqu'à la phrase finale de Dents pour dents, dans ce qui semble être une histoire de croque-mitaine de plus. 

Dans Dialogue avec le robotAnthony Boucher se livre au même exercice que Walter Michael Miller et son Saint Leibovitz (voir Fiction n°27), avec toutefois moins de péripéties et plus de bavardage - principalement entre l'homme et sa créature qu'est le robot. Mais il s'agit surtout d'une démonstration de foi - un peu tautologique tout de même.

Témoignage perdu, par Victoria Lincoln est une très belle nouvelle de double, touchante et feutrée, qui ne prend rien au fantastique tout en usant complètement d'un de ses thèmes. Un ton sans pareil. 

« Deus nobis haec otia fecit : Un dieu nous a préparé ces loisirs »

(Citation tirée des Eglogues du poète Virgile (-37) servant de "gimmick" à la nouvelle "Le Yoreille"). 

On se doit de reconnaître un métier certain chez Pierre Véry, connu pour ses romans adaptés au cinéma tels "Les disparus de Saint-Agil" ou "Goupi mains rouges". Avec une aisance à manier, dans un style tout personnel, l'anticipation et les sujets imbriqués  - formant ainsi une peinture assez complète d'une société de l'avenir - le thème central dans Le Yoreille pourrait être celui du mutant, et pourrait même servir au récit de l'histoire du futur que dresse de son côté Nathalie Henneberg ; le style en est toutefois tout autre, et le ton plutôt humoristique.

Le singe vert semble comme écrite d'un trait, au sujet subtil et très "sturgeonnien" : la différence. Ici, il est question de l'homosexualité telle qu'elle pouvait être encore perçue au début des années 60, et Theodore Sturgeon s'en tire très habilement pour n'en tirer ni jugement hâtif ni condescendance - grâce à une pirouette toute SF mais légère. 

Une nouvelle débutante française dans « Fiction ». Cette jeune femme de vingt-cinq ans mérite l'attention, même si sa première histoire publiée n'échappe pas, dans son thème, à certains effets abusifs. Il nous semble en effet qu'elle a su créer un climat, ce qui est essentiel dans le domaine du fantastique, et le rendre à la longue fascinant. Son récit, qui raconte le glissement d'un être humain vers un monde intercalaire, évoque dans ses péripéties la logique trouble d'un cauchemar.

Bien que tirant un peu en longueur, Vers un autre pays sans nom est une nouvelle touchante. En effet, on pourrait plaisanter sur la posture de Dorémieux usant de son privilège de rédacteur en chef pour faire publier ses propres textes sous le pseudonyme de Monique Dorian. Mais lorsque l'on sait que cette histoire de dérive vers la folie et la décompensation psychotique a été écrite par Dorémieux et son épouse Monique (mariés en 1958), et que l'on apprend que celle-ci sera victime d'une maladie mentale lors des quelques années qui suivront, on ne peut que frémir à l'idée de la marche tragique et réelle, quasi prémonitoire, qui s'exprime ici.

La politique en SF sera bien ce qui marquera le genre durant ces années 60. Comme le précise la revue dans son introduction, "la science-fiction en principe ne fait pas de politique. Mais cela ne veut pas dire qu'elle doive s'abstenir de marquer la vanité de nos querelles politiques, ni le fait qu'elles sont peut-être appelées à disparaître un jour."

Dans Et s’il n’en reste qu’un…, Poul Anderson propose de décrire en creux une société future qui n'a ni persévéré dans le capitalisme, ni dans le communisme soviétique. 

— « Nous avons ce qu'il nous faut. » Le Maire se passait une main sur le ventre, « Même si l'on m'y obligeait, je ne pourrais pas manger plus que je ne mange à présent. »

On repensera bien sûr à "Marée montante" de Marion Zimmer Bradley (voir Fiction n°40, n°41 et n°42). Mais on y retrouve toujours, un peu par transparence, l'idéal de civilisation de Poul Anderson, un brin viking, où les hommes s'adonnent à la chasse et à l'artisanat, et les femmes à la cuisine.

Suivez les instructions est une petite blague d'Isaac Asimov à l'époque du "Do it yourself". 

Pour finir, dans la chronique ICI, ON DÉSINTÈGRE !, on remarquera l'entrée au comité de rédaction de Roland StragliatiTraducteur de Primo Levi, de Bram Stoker, de Leo Perutz… il sera également l'éditeur avec Jacques Goimard de la Grande anthologie du fantastique (Livre de poche). 



18 septembre, 2024

Fiction n°077 - Avril 1960

Fort du succès de sa première anthologie regroupant les jeunes espoirs de la science-fiction "à la française", Fiction se propose dans ce numéro 77 d'inaugurer une nouvelle rubrique permettant à des novices en la matière de publier leurs premières (courtes) nouvelles. A l'orée de ces années 60, et seule revue à tirage respectable restante après la défection de Galaxie, Fiction poursuit sa prise de conscience d'un champ éditorial plus large que le simple tirage d'une revue mensuelle dans un genre neuf mais déjà en mutation en Europe.

Clic droit sur la ville entrevue par Forest.

Sommaire du Numéro 77 :

NOUVELLES

 

1 - Michel DEMUTH, La Ville entrevue, pages 3 à 31, nouvelle
2 - Stuart PALMER, Une créature de rêve (Dream Stuff, 1957), pages 32 à 41, nouvelle, trad. René LATHIÈRE *
3 - Alain DORÉMIEUX, Fugue, pages 42 à 51, nouvelle
4 - Jane ROBERTS, Sans issue (Impasse, 1959), pages 52 à 59, nouvelle, trad. Régine VIVIER *
5 - Jacqueline H. OSTERRATH, Le Masque, pages 60 à 63, nouvelle
6 - Poul ANDERSON, L'État d'urgence (For the Duration, 1957), pages 64 à 77, nouvelle, trad. P. J. IZABELLE *
7 - Idris SEABRIGHT, Le Bazar bizarre (Graveyard Shift, 1959), pages 78 à 85, nouvelle, trad. Anne MERLIN
8 - J. T. McINTOSH, La Seconde chance (Tenth Time Around, 1959), pages 86 à 106, nouvelle, trad. Régine VIVIER *
9 - Rog PHILLIPS, Le Diable par la queue (Services, Incorporated, 1958), pages 107 à 122, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH *
10 - BELEN, Veillons au salut du vampire, pages 123 à 123, nouvelle
11 - Gérard GRIFFON, Les Trucs, pages 124 à 124, nouvelle *
12 - Michel FRIEDMAN, Les Sirènes, pages 124 à 125, nouvelle *
13 - Jean-Louis M. MONOD, La Brute, pages 125 à 125, nouvelle *
14 - Jacques ANCET, Vertige, pages 125 à 126, nouvelle *
 

CHRONIQUES


15 - (non mentionné), Notre référendum 1960 - Résultats du questionnaire de février, pages 127 à 128, chronique
16 - COLLECTIF, Ici, on désintègre !, pages 131 à 141, critique(s)
17 - (non mentionné), Vu et lu..., pages 142 à 142, article
18 - F. HODA, Le Cas Arnold, pages 143 à 144, article


* Nouvelle restée sans publication ultérieure à ce numéro.

 

" C'était une chose que de haïr et de désirer la lutte durant des années, c'en était une autre de vivre cette lutte et d'y avoir le dessous. "

La ville entrevue est un très bon récit d'anticipation de Michel Demuth, capable tout autant de réflexions anthropologiques que de péripéties. Un texte, donc, bien équilibré qui structure fort bien le genre SF dans ce qu'il a de spéculatif, tout en restant trépidant. On pourra regretter que Demuth n'écrivasse pas davantage, mais il sera un très prolifique directeur de collections chez Opta par la suite, et marquera durablement l'édition de la SF en France.

Créateur malgré lui, le protagoniste de Une créature de rêve crée une belle pagaïe cosmique. Le concept aurait pu aller plus loin encore, mais l'ensemble composé par Stuart Palmer demeure léger et agréable.

Avec Fugue, Alain Dorémieux tisse son univers futuriste en poursuivant, avec l'évocation d'un zoo galactique, ce qu'il a construit avec "La vana", sans préméditation cependant et avec certaines maladresses scénaristiques. Par exemple, pour obtenir un billet d'avion, le jeune protagoniste appelé Ilcar, qui n'est qu'un enfant doté de pouvoirs étranges dus à sa symbiose avec une entité extraterrestre, neutralise la volonté d'une hôtesse, alors que plus tôt, pour obtenir nourriture et un peu d'argent, Ilcar s'en est remis au vol chez un épicier et à l'agression d'un vieil homme. On pourra en conclure que Dorémieux est bien meilleur écrivain dans le lyrisme des sentiment que dans l'élaboration des péripéties, et on lui pardonnera.

Dans une ambiance d'Ecole des Beaux Arts qui n'est pas sans rappeler la nouvelle homonyme de Robert W. Chambers, Le masque joue un jeu de miroir entre les êtres désirés et désirant, et où l'influence de la magie se fait aussi souterraine que l'ouvrage du temps. Plus subtil qu'il n'y parait, par Jacqueline H. Osterrath.

Gouverner sous L'état d'urgence est un bien commode levier pour conserver le pouvoir sans limitation de durée. Voilà ce qu'exprime Poul Anderson - point de vue qui pourrait paraître réactionnaire mais qui n'est pas denué d'exemples historiques et concrets, voire contemporains...

Un commerce hanté de toute éternité, dans un Maine où loups-garous et dragons font partie du décor du bazar bizarre... voilà une nouvelle presque humoristique, ton inhabituel chez Idris Seabright.

« Mais pourquoi ne pas plutôt… heu… jouer aux courses, par exemple ? Ou à la bourse ? Ou…»

— « Il va y avoir bientôt un grand procès à ce sujet. Une grosse compagnie de Paris Mutuels va attaquer la Compagnie de la Seconde Chance, ainsi qu'une demi-douzaine de personnes qui ont gagné d'énormes sommes en pariant. Ils prétendront que les Retours en Arrière rendent leur travail impossible. Vous comprenez, on ne peut savoir si un joueur a, ou non, profité d'un Retour en Arrière, à moins de le mettre en état d'hypnose ou de le traiter au penthotal. Un nouveau règlement sera institué : il pourra être exigé de toute personne gagnant subitement une grosse somme aux paris mutuels, à la Bourse, ou dans les assurances, ou à n'importe quel jeu public officiel, d'avoir à se soumettre à un questionnaire auquel il lui faudra répondre sous hypnose ou sous l'action du penthotal.

» S'il est découvert qu'elle a profité d'un Retour en Arrière, ses gains seront automatiquement annulés. » 

— « Et supposons qu'au lieu de profiter directement de son Retour en Arrière, une personne vende une information à quelqu'un d'autre ? » demanda Doreen, intéressée.

— « Hé, mais vous avez de la tête ! » fit Gene, admiratif. « Oui, cela aussi sera tenté, sans plus de succès : la personne interrogée révélera forcément sa source d'information – s'il y en a eu une – et le pot aux roses sera de toute façon découvert. Non, Retour en Arrière ne signifie pas fortune faite, croyez-moi.

Dans La seconde chance, il est question de commercialiser le voyage dans le passé, pour en faire une entreprise de modification du destin du client, qui s'accorde ainsi une seconde chance éponyme. On notera au passage qu'autant J. T. McIntosh y prévoit à tort un durcissement moral durant les années 70, autant il évoque un accident nucléaire en 1981 qui rappellera celui de Three Miles Island en Pennsylvanie en 1979. En tous les cas, il s'agit d'une romance intéressante et qui diversifie un peu les applications commerciales du voyage dans le temps et les paradoxes temporels.

Sans issue est le récit du début d'un deuil - là où ce sentiment est le plus intolérable. Sensible et touchant récit de Jane Roberts.

Le diable par la queue, par Rog Phillips, est un pacte faustien de plus, avec un Diable si imbu de lui-même qu'il révèle tout de son maître plan avant exécution. Cocasse, mais la nouvelle tourne un peu court.

Veillons au salut du vampire, par Belen, est une petite blague de vampires.

Côté jeunes auteurs : Les trucs, par Gérard Griffon, est une très courte blague post apo. Gérard Griffon sera de nouveau publié dans le Fiction spécial n°2, mais on n'en saura pourtant pas plus sur cet auteur (qui ne sera pas même pas mentionné dans la recension des publications antérieures).

Les sirènes, par Michel Friedman, décrit une attaque lors de la sempiternelle sirène mensuelle. En 1960, c'était encore le jeudi.

La brute est une autre blague très courte un peu en dehors des clous SF ou fantastique. Son auteur, le suisse Jean-Louis M. Monod, sera beaucoup publié par Versins dans sa revue Ailleurs.

Vertige, par Jacques Ancet - qui deviendra poète reconnu - exprime très bien l'attrait du vide.

Pour terminer, dans la Revue des livres, on appréciera un bon billet de Demètre Ioakidimis sur un recueil de Conan Doyle regroupant les histoires du professeur Challenger.

17 septembre, 2024

Cadeau bonus / Hommage à Jean RAY : "Harry Dickson - Une intégrale" Volume 3 - première partie (Janvier-Juin 1934)

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"… cette demeure, blottie dans la hideuse enclave de la terne Lloyds Street, avait un visage. Un visage d’attente et d’épouvante. Elle suait littéralement la peur de cette attente."

(in « Messire l’anguille - 2. Le carré rouge).

Comme tous les 17 septembre depuis 2022, le PReFeG Rend hommage à un auteur qui lui est cher : Jean Ray, disparu le 17 septembre 1964.

60 ans après sa disparition, Jean Ray est toujours reconnu comme un littérateur majeur tant en fantastique qu'en policier, en témoignent les rééditions renouvelées de décade en décade de ses œuvres.

Comme les deux années précédentes, c’est pour nous l’occasion de contribuer à faire (re)découvrir le foisonnement d’une œuvre dont l’établissement d’une bibliographie exhaustive est un véritable challenge, tant Ray multiplie les pseudonymes, les langues (français, néerlandais…) et des publications anonymes dans des revues mal conservées car déconsidérées dès leurs parutions. Dans cette catégorie figurent « Les aventures de Harry Dickson », dont l’histoire éditoriale et le sauvetage in extremis de l’oubli vous est détaillé dans l’article de 2022 : "Harry Dickson - Une intégrale" Volume 1 (1931 - 1932).

Carton plein pour Jean Ray, unique auteur des 26 récits, publiés toutes les deux semaines en cette année 1934. On y notera que le personnage de Dickson s'étoffe d'une histoire et d'un caractère qui se démarque de plus en plus de son modèle initial - Sherlock Holmes - et la petite galerie de personnages l'entourant (son élève Tom Wills et le surintendant Goodfield, principalement) prennent davantage leur part aux péripéties.

Nous vous proposons pour cette "fournée" les 13 premiers récits parus en 1934, de Janvier à Juin, principalement du fait de la grande masse d'histoire à traiter, et pour vous en offrir une qualité numérique optimale.

Le volume III se composera donc en deux parties, la seconde viendra dans quelques mois, et le présent article fera l'objet d'une mise à jour. Plus particulièrement, et pour expliciter nos délais de publication, une nouvelle de notre volume III.2 sera issue d'un scan original et d'une numérisation entièrement réalisée par nos soins - cette histoire ayant échappé aux rééditions chez Marabout, NéO ou Corps 9 et qui nous ont servi de base.

Vers notre page dédiée à l'auteur

Pour l'heure, au sommaire de ce Volume III .1 (janvier-juin 1934) de cette proposition d’intégrale des nouvelles d’Harry Dickson écrites par Jean Ray, vous pourrez lire :

113 / MESSIRE L’ANGUILLE

(Sauf précision, les résumés proposés ici sont empruntés au site dédié à Jean Ray et sont © Jean Pelletier).

Celui que l'on appelle l'Anguille est un cambrioleur spectaculaire derrière lequel courent en vain Harry Dickson et son jeune élève Tom Wills depuis des mois, suscitant l'ironie de la presse. L'originalité de Messire l'Anguille: s'introduire nuitamment chez des vieillards peu fortunés, bouleverser leur intérieur, les faire mettre torse nu, les contempler sous tous les angles, puis les gifler avant de disparaître, le plus souvent sans butin ! mais la farce tourne au drame lorsque Joe Haskins, un vieil ivrogne solitaire, est assassiné et atrocement mutilé par l'audacieux criminel. Mais qui diable est cette insaisissable Anguille ? quels sont les desseins de ce malandrin hors du commun ? et surtout, Dickson mettra-t-il un terme à ses agissements ?
114 / LE CHATIMENT DES FOYLE

En Ecosse, au pied des Highlands, une vague de meurtres d'une effroyable violence terrorise la population. Le monstre rode encore… le monstre ? pas pour Harry Dickson qui soupçonne plutôt Charles Foyle, un individu sanguinaire et difforme. Mais Lady Lavinia, sa tante machiavélique, n'a-t-elle rien à se reprocher ? Et William Sharkey, cet homme sans pitié ? A côté de ces personnages repoussants, les charmantes et mystérieuses campeuses du "Club des Amazones" apportent un peu de réconfort au célèbre détective, qui tombera même amoureux d'une d'entre elles, la belle Minerva Campbell. Dickson devra faire la lumière sur les ténèbres qui recouvrent la race maudite des Foyle...

115 / LA GRANDE OMBRE

(Ce résumé est extrait de l’essai de Jacques Van Herp : « Harry Dickson – Le Sherlock Holmes américain », - Collection « Ides et autres », édition Recto-Verso, Bruxelles 1981)

Histoire d’un réfugié belge en Angleterre. Il habite là où sévissaient les Horlogers de la Mort, commandés par Red Lilith. Sous l’envoûtement de la grande ombre, il en vient à les copier et devient criminel.

116 / LES EAUX INFERNALES

(Résumé de Jacques Van Herp)

On coule des péniches afin d’interdire les eaux du marais Le Clen, où un fraudeur exploite clandestinement une mine d’argent.

117 / LE VAMPIRE QUI CHANTE

Un bon épisode qui regroupe beaucoup des motifs topiques de la série.

La tranquillité de la petite ville de Marlwood est perturbée par des événements atroces. Des meurtres sont commis avec une sauvagerie inouïe par un tueur qui, une fois son forfait accompli, laisse entendre un chant merveilleux. Comme les victimes ne sont pas dévalisées, il faut croire que l'assassin n'agit que par goût du sang. L'enquête nous fait connaître quelques-uns des principaux habitants de la ville : le juge Taylor ; Bob Trunch, l'antipathique propriétaire du journal local ; Sir Humphrey Cruckbell, le châtelain ; et Mr Tapple, un brasseur. Il devient évident que chacun de ces hommes se sait menacé par le Vampire, mais tous refusent d'éclairer la justice. Le juge Taylor préfère le suicide à la confession et Tapple et Sir Cruckbell fuient la protection de Harry Dickson et Tom Wills pour aller d'eux-mêmes au-devant de la mort. Le secret partagé par ces hommes doit être bien terrible pour les pousser à de telles extrémités...

118 / LE MYSTÈRE DE BANTAM-HOUSE

Dickson affronte cartes sur table un vilain adversaire.

(Extrait du résumé de Jacques Van Herp)

Six infirmières, dont trois fort jolies, sont retrouvées dans la Tamise. Elles furent attirées dans Bantam-House, soi-disant pour soigner un malade imaginaire. En fait, pour se voir livrées à une monstruosité :
Une créature de cauchemar se tenait dans l’ouvert ure de la draperie, le couvant d’un regard rouge.
C’était la Mort…
Oui, telle que se la représentent, les hommes dans leur épouvante. Un squelette aux ossements blanchâtres, drapés dans une sorte de suaire d’un blanc gris, d’où émergeait une tête de mort au rictus impitoyable.

119 / LA CIGOGNE BLEUE

En proie à une puissance ennemie. Espionnage et secte criminelle.

Quand il libère un prisonnier captif dans un château d'Allemagne, Harry Dickson trouve une petite plaque sur laquelle est gravée une minuscule cigogne bleue. Cette découverte aura une importance capitale par la suite. Dans une rue misérable de Londres, surnommée Rotten Row, le cadavre d'une épicière, Mrs Chandler, est découvert par une cliente, Mrs Petty. Il s'avère cependant que Mrs Petty a menti aux enquêteurs. Elle possédait une clé lui donnant accès à la maison de l'épicière, qu'elle aurait d'ailleurs volée. Mrs Petty est-elle la meurtrière de Mrs Chandler ? Au moment d'être capturée, Mrs Petty tente de se débarrasser d'un petit insigne sur lequel est gravée une cigogne. Cet épisode est donc lié à l'aventure allemande de Harry Dickson. Tom Wills soupçonne une affaire d'espionnage, car les fenêtres de Mrs Chandler donnent sur l'arsenal de Woolwich. Dans la prison de Newgate, un mystérieux médecin organise l'évasion d'un prisonnier gardé au secret. Ce prisonnier a lui aussi en sa possession un insigne à la cigogne et n'a rien de plus pressé que de se rendre à l'épicerie de Mrs Chandler. Puis Harry Dickson doit consacrer plusieurs jours à Lady Millicent Marlrose, qui prétend avoir été attaquée, dans sa chambre fermée, par une gigantesque cigogne. Pendant ce temps, Tom Wills est capturé par une bande inquiétante où cohabitent Allemands, Asiatiques et malandrins britanniques. Pour sauver son élève, Harry Dickson devra pénétrer au cœur du repaire des criminels et découvrir l'identité de leur chef suprême, celui que l'on désigne comme la Cigogne Bleue.
120 / CE PARADIS DE FLOWER DALE
Avec un final révoltant, Harry Dickson en villégiature… travaille encore et toujours.

(Résumé de Jacques Van Herp - attention : divulgâchage)

Démantèlement d’un gang spécialisé dans la capture de jeunes filles, expédiées par cargos vers l’Amérique du sud. La traite des blanches, dont on parlait tant à l’époque.
Jean Ray eut toujours une haine farouche pour les marchands de chair humaine et il le clame à chaque coup.
Nous avons un décor paisible, de campagne flamande et non anglaise.
La province semblait tenir la petite ville maritime dans sa lourde emprise. Quand on passait par une des six rues proprettes aux maisons basses et vieillottes, aux jardinets précieux et ridicules, les rideaux de mousseline se soulevaient un peu, et des yeux fureteurs suivaient attentivement les gestes des étrangers.

121 / L’ESPRIT DU FEU

Un Harry Dickson où l'organisation criminelle et l'ennemi n'est pas celui auquel on s'attendrait. Encore de la justice expéditive de la part du détective, qui gagne en audace et en hargne face à l'atrocité des "vilains".

"... et dire que nous vivons au siècle de l'électricité, du machinisme outrancier, de la radio et des avions ! Le passé ne perd jamais ses droits, my boy !" (in Chapitre 2.Dans les ruines)

Persistance du passé, lieux et personnages figés dans le temps, on retrouve encore ce motif dans cette aventure (motif peut-être dicté par les couvertures "démodées" de Roloff, qui dataient du début du Siècle, et que Ray devait considérer comme couvertures imposées par l'éditeur de ses travaux de "traduction".) 

(Extrait du résumé de Jacques Van Herp)

Dans la ville de Launton, on fabrique des porcelaines imitation de celle de Chine. D’une part, l’Esprit du Feu tient à punir les sacrilèges imitateurs ; d’autre part, les fabricants ont retrouvé le secret utilisant la lumière solaire...

122 / TURCKLE-LE-NOIR

Dickson instrumentalisé par un vengeur masqué. Une affaire pleine de faux semblants et de rebondissements.

(Résumé - laconique - de Jacques Van Herp)

Punition, après vingt ans, d’un crime impuni.

123 / LES YEUX DE LA LUNE

Vieux cultes impies et hypocrisies cléricales pour cette enquête un peu hâtive. On y découvre toutefois dès le premier chapitre un procédé original qui sera repris par le cinéaste Dario Argento pour son Giallo "Quatre mouches de velours gris" :

— Avez-vous vu l’expérience réussir, Mr. Dickson ?

— Par deux fois, mais sans toutefois révéler l’image de l’assassin.

» La rétine du mort, traitée par l’appareil spécial que manie en ce moment notre camarade Needle, nous fournit une plaque fort curieuse : la chambre du mort, plusieurs des objets entourant le cadavre, le tout vu sous un angle raccourci, des plus grotesques. Mais aucune silhouette humaine, plus que probablement parce que l’assassin devait avoir quitté sa victime quelque temps avant la mort de celle-ci.

— C’est plausible, observa Goodfield. Le fait est que, lorsque l’ingénieur opticien Morrison présenta sa découverte à la Justice anglaise, il y a une vingtaine d’années, ce fut une rude émotion pour le Yard.

» Pensez donc : le mort gardant sur la rétine la dernière vision de la vie ! C’était la clarté sur bien des crimes. Hélas ! la réalité ne répondit pas à l’attente. Il fallait un difficile concours de circonstances pour que l’expérience puisse réussir.

 

Le cadavre de Miss Bertha Hyams est découvert dans la très austère église du révérend Randall. On se demande ce qui a bien pu imprimer une telle expression de terreur sur le visage de la morte. Les marguilliers Gunnesbury et Swinebread étaient présents au moment du crime, mais tous deux refusent de s'expliquer. Swinebread est même chassé du temple à la demande de Harry Dickson, et le sacristain Wurdee est lui aussi congédié pour avoir menti sur son emploi du temps. Décidément, plusieurs fidèles de cette église semblent jouer double jeu, à commencer par Rosalinde Hyams, la soeur de Bertha. Rosalinde, très digne en apparence, est aperçue aux environs des Trois Drapeaux, un établissement fréquenté par la basse pègre de Londres...
124 / L’ILE DE MONSIEUR ROCAMIR

Harry Dickson et les épiciers comploteurs. Espionnage et meurtres en série.

(Extrait du résumé de Jacques Van Herp)

Le début vient presque textuellement de L’Ecole des Robinsons de Jules Verne, avec l’île mise en vente publique. Mr Rocamir, un ancien épicier enrichi, l’achète. Alors commence un mystère qui s’épaissit de plus en plus : des épiciers apparaissent et foisonnent...

125 / « X.-4 »

A l'instar de Don Quichotte et de son modèle Sherlock Holmes, Dickson augmente sa notoriété par le récit de ses aventures, comme en témoigne cette introduction :

"Goodfield allait entamer le récit de sa longue et laborieuse carrière, quand soudain il se ravisa.

— À propos, Castairs, tout cela ne s’apprend pas à l’université, et pourtant vous avez fait preuve de qualités épatantes. Je me demande à quelle école vous avez pu les acquérir.

Le jeune homme partit d’un rire clair et agréable.

— À l’école de Harry Dickson, monsieur le Superintendant !

Goodfield dressa l’oreille.

— Comment, vous connaissez Harry Dickson ?

— Pas le moins du monde, hélas ! Je n’ai vu que ses portraits, par contre je crois connaître de A jusqu’à Z toutes ses aventures, du moins celles qu’il a bien voulu confier au public. Je crois avoir usé quelque peu de ses méthodes : ne jamais négliger le détail, croire en la grande puissance de la psychologie, payer de sa personne."

George Castairs, jeune et brillant inspecteur frais émoulu de son université, est aux anges lorsqu'il obtient de son supérieur Goodfield d'assister dans l'une de ses enquêtes son idole, le grand Harry Dickson. Enquête qui les amène dans le hameau de Bushtree, où l'aubergiste local, qui fait également office de receveur des postes, vient d'être assassiné. Visiblement, l’œuvre d'un voleur qui voulait s'emparer du contenu d'un colis précieux... mais la mort frappe encore le paisible village deux jours plus tard lorsqu'un fermier, Lewis Bell, est assassiné dans sa chambre. Contre le mur, une graphie étrange laissée en guise de signature par l'assassin: "X-4". Affaire sans grand mystère à première vue: la police locale arrête bientôt un suspect idéal, Wall Bradeck, qui clame pourtant son innocence... (...) Pour le jeune inspecteur et pour Harry Dickson, c'est une question d'honneur de mettre un terme aux agissements du meurtrier -ou de la meurtrière...- qui se cache sous le nom d'X-4.

Nous ne résistons pas au plaisir de partager cet extrait, quasi gratuit dans l'intrigue de cette histoire, mais qui se révèle être une miniature charmante et sympathique dans le pur style des contes fantastiques de Jean Ray :

Un soir le vieux Triggs, qui louait ses services à des fermiers des environs, tantôt comme bûcheron, tantôt comme berger, s’en revenait de Chipped-Barned, lesté d’une bonne dose de brandy et d’ale.

En toute autre circonstance, Triggs aurait fait un sage détour pour ne pas passer devant la sinistre demeure abandonnée, mais l’alcool lui avait donné du courage et puis, la nuit étant froide, il lui tardait de regagner sa couche, dans l’étable chaude et bien close aux vents de la plaine.

Il jura donc par tous les diables qu’il ne craignait pas les fantômes et prit la traverse qui devait le conduire devant la ferme de Bell.

Comme il s’en approchait, sa vaillance diminua, mais il lui en coûtait à présent de retourner sur ses pas, et autant que ses jambes incertaines le lui permirent, il se mit à courir.

Il arrivait à la hauteur de la ferme quand il resta soudain figé par l’épouvante : une forme sombre se mouvait entre les halliers.

Triggs ne put ni crier ni courir, il resta là, comme il le raconta par la suite, comme une statue de pierre.

La forme se mouvait lentement, et petit à petit elle émergea de l’ombre.

Un râle échappa de la poitrine du vieillard car à la lueur brouillée du croissant de lune, il venait de reconnaître un visage affreusement livide : celui de Bob Merchant.

Le fantôme le vit alors et lui fit une affreuse grimace.

Cela rendit des forces au berger, en qui les fumées de l’alcool s’évanouirent sous l’empire de la peur.

Il se mit à courir.

Pas bien loin toutefois, il trébucha soudain et roula sur le sol.

Mais en même temps quelque chose de flasque et de sombre tomba sur lui ; il fut roulé comme une crêpe dans la farine, secoué d’importance et soulevé.

Triggs perdit connaissance comme s’il avait été une petite femmelette de rien du tout et non un solide et noueux vieillard.

Jugez toutefois de sa surprise à son réveil.

Il s’attendait ni plus ni moins à se trouver parmi les brasiers de Satan, ou tout au moins dans un cul de basse-fosse, et voilà qu’il était étendu sur un large et moelleux divan, dans une chambre où à son estimation, brûlaient bien cent lampes, bref, un décor si merveilleux qu’il crut à quelque beau rêve, comme il n’en avait d’ailleurs jamais eu.

« J’y suis, pensa Triggs, je suis mort, le fantôme m’a tué… mais il n’a pu m’entraîner en enfer avec lui. Dieu a dû me remettre tous mes péchés, quelle chance et voilà que je suis au paradis. Mais j’ai faim moi… »

Comme si quelque ange tutélaire avait entendu sa pensée, la porte s’ouvrit et une dame avenante lui demanda :

— Que prenez-vous pour votre petit déjeuner, monsieur Triggs ?

— Du poulet, balbutia Triggs, qui n’en avait pas mangé deux fois dans sa vie.

La bonne dame lui sourit et une demi-heure plus tard, elle revint, portant, outre un beau poulet rôti, des grillades, du jambon rose et du jam de cerises.

En plus, elle mit devant lui une bouteille de vin rouge et un petit flacon de vieux whisky.

— C’est-il de votre bonté, madame l’ange, dit Mr. Triggs, de demander au Bon Dieu si je puis fumer dans son paradis.

La dame sourit et lui remit aussitôt une caisse remplie de magnifiques cigares blonds.

— Et dire que cela va durer ainsi toute l’éternité ! jubila Mr. Triggs en dépeçant d’une main un peu frustre la tendre et savoureuse volaille.

L’élu ne tarda pas à découvrir que son appartement au paradis contenait tout le confort possible. Il trouva des livres avec des images qu’il adorait, et puis des pipes qu’il préférait au fond aux cigares et même un phonographe qu’il fit jouer à l’instant. Il n’y avait que des valses et des marches militaires sur les plaques et, précisément, Mr. Triggs idolâtrait ce genre de musique.

— Ah ! ils s’y connaissent au paradis, dit-il.

Son souper fut aussi luxueux que son dîner, et, pour se mettre au lit, il trouva un pyjama en belle flanelle, ce qui le rendit perplexe tout d’abord, et fier et heureux ensuite.

Le lendemain, il varia ses repas, demanda du gigot, du veau, des biftecks grillés et obtint tout cela comme par magie.

— Je pourrais-t-y pas faire un petit tour dans le jardin ? demanda-t-il à madame l’ange.

Mais cela ne lui était pas autorisé, et il ne s’en formalisa pas outre mesure.

— Faut croire, monologua-t-il, que c’est encore un petit peu le purgatoire ici, et que pour se promener dans le jardin, il faut être tout à fait au paradis mais il est vrai que j’ai tout de même quelques péchés sur la conscience.

Il se trouva ravi de son sort et demanda à sa paradisiaque hôtesse un almanach du parfait cultivateur. Livre qu’il savait quelque peu épeler, qui lui fut remis le même jour et qui combla, pour l’heure, tous ses vœux.

Aussi allons-nous le laisser à son bonheur pour gagner des lieux moins lumineux et moins bénis.

En bonus de cette première partie des nouvelles de 1934, ce volume propose également l’article « Les Aventures cinématographiques de Harry Dickson », repris de L’intégrale NéO, volume 4, rédigé par François Truchaud - article qui reprend lui-même de larges extrait d'un entretien avec Alain Resnais publié dans le (recherché) Cahier de l'Herne consacré à Jean Ray.



Tenir notre rythme annuel de publication de cette proposition d’intégrale des nouvelles « Harry Dickson » écrites par Jean Ray, tout en poursuivant la publication hebdomadaire des numéros de la revue Fiction (et bientôt Galaxie deuxième série !), représente un authentique marathon de lecture et de mise en forme numérique. Rien de tout cela n'aurait été possible sans d'habiles et anonymes "scanneurs d'origine" (qu'ils en soient ici très chaleureusement remerciés), qui ont très largement dégrossi ce travail, auquel nous ne faisons qu'apporter une relecture attentive, une remise en forme, et nos modestes fiches de lecture.

Nous publierons dans quelques mois la suite de ce volume III, pour clore l'année 1934 des aventures de Harry Dickson. Le challenge ne s'arrêtera pas là, nous le souhaitons en tous les cas.

D'ici là, bonne lecture à vous, et vive le partage ! 

11 septembre, 2024

Fiction n°076 – Mars 1960

Un bon lot de nouvelles introuvables depuis - dont une de James Blish et une très sympathique nouvelle de Lester Del Rey - ainsi qu'une superbe couverture de Jean-Claude Forest très productif pour Fiction, marquent ce numéro du printemps 1960.

 

De nouveau à cheval sur le principe du clic droit.

Sommaire du Numéro 76 :

NOUVELLES

 

1 - Henry BEAM PIPER, Le Diadème (The Keeper, 1957), pages 3 à 25, nouvelle, trad. René LATHIÈRE

2 - Theodore STURGEON, Douce-Agile ou la Licorne (The Silken Swift, 1953), pages 26 à 42, nouvelle, trad. P. J. IZABELLE

3 - Mark CLIFTON, Le Souvenir et la réflexion (Remembrance and Reflection, 1958), pages 43 à 79, nouvelle, trad. Roger DURAND *

4 - Raymonde BOREL-ROSNY & Robert BOREL-ROSNY, Sous le vieux Pont-Neuf, pages 80 à 88, nouvelle *

5 - James BLISH, Les Ongles (The Masks, 1959), pages 89 à 92, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH *

6 - Charles MOREAU, Chasse nocturne, pages 93 à 93, nouvelle *

7 - Lester DEL REY, La Fille de l'espace (Lady of Space, 1958), pages 94 à 106, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH *

8 - Jean-Charles PICHON, Dieu n'a pas de mémoire, pages 107 à 118, nouvelle *

 

CHRONIQUES


9 - (non mentionné), Notre référendum 1960, pages 119 à 121, chronique

10 - JEAN-JACQUES, Qu'est-ce que la gravitation ?, pages 123 à 127, article

11 - Jacques BERGIER & Alain DORÉMIEUX & Gérard KLEIN & Igor B. MASLOWSKI, Ici, on désintègre !, pages 128 à 131, critique(s)

12 - COLLECTIF, Le Coin des spécialistes, pages 132 à 133, critique(s)

13 - Jacques BERGIER & Gérard KLEIN & Pierre VERSINS, Vu et lu..., pages 133 à 135, critique(s)

14 - F. HODA, Tom-Pouce contre la momie, pages 136 à 137, article

15 - Jacques BERGIER & Alain DORÉMIEUX, Aux frontières du possible, pages 138 à 139, chronique

16 - COLLECTIF, Tribune libre, pages 141 à 144, article


* Nouvelle restée sans publication ultérieure à ce numéro.

Dans un contexte d'un avenir où la Terre serait revenue à un stade plus primitif, Le Diadème, composé par H. Beam Piper, décrit avec moult péripéties une histoire de chasse, et une longue traque dans les glaces,

Douce-Agile ou La Licorne est un très joli conte, d'une ambiance médiévale et enchantée, très étonnante de la part de Theodore Sturgeon.

Mark Clifton est décrit comme "Conseiller en relations humaines" par Fiction dans son texte de présentation. On observera que ce poste deviendra dans le langage courant et managérial "directeur des ressources humaines" - comme une prise de pouvoir bureaucratique. Quoi qu'il en soit, Le souvenir et la réflexion est une très longue, trop longue nouvelle pour une histoire dont les tenants (une communauté de mutants faisant Gestalt comme ceux de Sturgeon dans "Les plus qu'humain"), et les aboutissants (la conquête spatiale), ne valent pas autant de mots…

Dans sa nouvelle, Clifton évoque un dessin animé de vulgarisation scientifique, et qui fixe les représentations du grand public - ce que déplore le narrateur. Fiction ajoute une note sur la référence qui est faite à un dessin animé véritable réalisé par les studios Disney, non traduit en France. Vous pourrez le retrouver dans notre article sur le n°27 de Galaxie de février 1956.

On se souvient que ce même Mark Clifton avait commis une fable assez phallocrate intitulée "Une femme à bord" (in Galaxie n°21). On se rappellera également la controverse qui anima les pages des Fiction 37 et 38, au sujet de la légitimité de la présence des femmes dans la conquête de l'espace. Avec La fille de l'espace, Lester Del Rey propose une réponse franche, sincère et sans sexisme, où l'on sent bien poindre la progression morale que connaitront les années 60.

L'amour plus fort que la mort. Un thème très conventionnel pour Sous le vieux Pont-Neufune nouvelle qui ne l'est pas moins, composée à quatre mains par Raymonde et Robert Borel-Rosny.

Dans Les ongles, ou même dessus, on débusquera une ambiance, certes, et une trouvaille de James Blish que d'y placer des microfilms, mais pas plus.

Chasse nocturne, de Charles Moreaucomme pour "Mon ami de loin" de Michel Ehrwein, est une histoire fantastique un peu creuse malgré un effet de style intéressant. Charles Moreau, tout jeune en cette année 1960, sera une figure discrète mais érudite de la SF en France - il fera par exemple partie de la rédaction des excellentes revues de bande-dessinées "Ere Comprimée" et "Fantastik", et mènera plusieurs interviews d'auteurs anglo-saxons (comme Poul Anderson).

Dieu n'a pas de mémoire, par le poète et essayiste Jean-Charles Pichon, nous conte en deux parties une jolie histoire d'enfance retrouvée, rédigée avec style - même parfois un peu trop - et l'expression de ce sentiment un peu trouble déjà décrit par Nathaniel Hawthorne : la perception particulière de la réalité au sortir d'un assoupissement inopiné. 

Un petit extrait nous expose un phénomène encore théorique mais que l'on sent potentiellement advenir de nos jours : le principe de singularité, ou : l'intelligence artificielle des robots serait-elle capable de supplanter la gouvernance humaine ?

ALERTE AUX ROBOTS.

Le professeur Norbert Wiener, père de la cybernétique, a prononcé, lors de la réunion à Chicago de l'association américaine pour l'avancement des sciences, un discours fort alarmant, il estime que la révolte des machines contre l'homme est proche et que l'homme n'y pourra rien parce que ses réactions sont trop lentes. Les machines sont capables de prendre une décision et d'effectuer un raisonnement en quelques nano-secondes (une nano-seconde = un millième d'un millionième de seconde). La révolte des machines dans le monde entier pourrait être décidée et accomplie en un millionième de seconde sans que l'homme ait pu détecter quoi que ce soit. Ce n'est pas là de la science-fiction, mais l'avis autorisé d'un des plus grands savants de notre temps.

(Réf. : « Time », 11 janvier 1960.)

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