26 novembre, 2025

Galaxie (2eme série) n°007 – Novembre 1964

De longs récits pour ce numéro de Galaxie, qui fait aussi état de l'embouteillage dont la rédaction est une victime heureuse, en ayant augmenté son corpus éditorial aux revues "If" et "World of Tomorrow", en plus de "Galaxy magazine". Ce sera pour le plus grand plaisir des lecteurs de cette année 1964, qui pourront découvrir des récits de qualité quelques mois après leur publications aux Etats Unis. Plus de soixante ans après, nous ne bouderons pas non plus notre plaisir, notamment avec une nouvelle de Philip José Farmer jamais rééditée depuis !

L'insoutenable légèreté du clic droit !

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Sommaire du Numéro 7 :


1 - Frederik POHL & Jack WILLIAMSON, Les Récifs de l'espace (suite) (The Reefs of Space, 1963), pages 2 à 53, roman, trad. Pierre BILLON, illustré par Ed EMSH

2 - Philip K. DICK, Quelle chance d'être un Blobel ! (Oh, to Be a Blobel!, 1964), pages 54 à 71, nouvelle, trad. Christine RENARD, illustré par Gray MORROW

3 - Keith LAUMER, Invasion mentale (End As a Hero, 1963), pages 72 à 102, nouvelle, trad. Pierre BILLON *

4 - Harry HARRISON, L'Ultime rencontre (Final Encounter, 1964), pages 103 à 120, nouvelle, trad. Michel DEMUTH

5 - Willy LEY, D'autres candidats pour l'espace ? (For Your Information: Anyone Else for Space?, 1964), pages 121 à 131, article, trad. Pierre BILLON

6 - Philip José FARMER, Les Blasphémateurs (The Blasphemers, 1964), pages 132 à 159, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH *


* Nouvelle restée sans publication ultérieure à ce numéro.


Seconde partie pour Les récifs de l'espace qui ne manquera pas de rappeler le fameux "Limbo" de Bernard Wolfe, avec son lot de corps mutilés. Ici, les condamnés à mort sont bourrés de tranquillisants et servent de banque d'organes, dont on les prive et les mutile un à un. Et le tout dans un cadre tropical paradisiaque..  Frederik Pohl et Jack Williamson s'en sortent "haut la main" !


" Sa pension ne représentait qu’un quart de ce que gagnait sa femme et cela blessait son amour-propre. Pour augmenter ses revenus, il avait cherché un moyen de gagner de l’argent tout en restant chez lui." Voilà ce qu'écrit Philip K. Dick sur le protagoniste de Quelle chance d'être un Blobel ! Cela valait bien aussi pour lui-même, et c'est bien ce qui sera touchant dans l'ensemble de ses écrits : cette capacité à parler de lui-même et de son expérience par petites touches, à travers ses personnages. Ici, Dick s'amuse avec le concept de pantropie, et imagine un état bipolaire qui fait varier de la forme humaine à une forme unicellulaire extraterrestre. On retrouverait presque les problématiques des contes de fées, d'hommes et de femmes changés en bêtes ou en grenouilles, si les deux états ne représentaient pas deux espèces en guerre. Métissage, ou conversion d'espèces qui rappellerait aussi les problématiques liées au genre, Quelle chance d'être un Blobel ! évoque tout cela et entre dans le catalogue des nouvelles traitant de transhumanisme. Non sans humour !


Invasion mentale rappellera "Fugue" de Alain Dorémieux (in Fiction n°70 - avril 1960). Keith Laumer y pose surtout la question du "retournement", c'est à dire celle d'un agent manipulé par le camp ennemi alors qu'il pense agir de son plein gré. Ici, le camp ennemi est une race extraterrestre de télépathes qui manipulent l'entendement et le libre-arbitre. Du bon Keith Laumer, une fois de plus.

  

L'ultime rencontre, orchestrée par Harry Harrisson, traite de la quête pour notre espèce d'une autre espèce intelligente que des humains. L'enjeu est avant tout métaphysique, mais ô combien serait-il rassurant de ne pas se retrouver seuls dans l'univers… Une belle nouvelle où là aussi il est question de pantropie.


Philip José Farmer reste fidèle à son thème de prédilection : le rapport à "Dieu", non pas en tant que divinité, mais en tant que créateur de monde(s). Dans Les blasphémateurs, il fait discourir ses personnages extraterrestres sur les traces évidentes du Créateur à travers les planètes de la galaxie… traces laissées là par d'habiles prédécesseurs pour marquer les esprits simples. Bien entendu, tout est plutôt affaire de maintien du pouvoir plutôt que de transcendance religieuse. Comme il l'écrit : "la religion est la trame de notre société. Excellent moyen de tenir le peuple en bride ou de justifier notre domination sur lui !" Puis, quand il sera temps de passer à de moins infantiles modes de société : "l’affaiblissement de la foi en la religion de nos pères n’affectera pas notre ardeur guerrière. Nous l’aurons remplacée par une autre croyance : le droit à la conquête."

19 novembre, 2025

Galaxie (2eme série) n°006 – Octobre 1964

Bien que l'accent soit mis sur la publication des "Récifs de l'espace", un bon roman d'aventures dystopiques de Pohl et Williamson, la grande surprise de ce numéro viendra d'une novella de Philip K. Dick, "La voix venue du ciel", qui rassemble déjà une bonne partie de son œuvre à venir. Pendant ce temps, Leiber et Knight s'exercent sans gravité sur des sujets cocasses, et Robert F. Young semble cousiner avec la mythologie spatiale de Nathalie Henneberg...

Ces oiseaux font plus "Clac" que Clic"

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Sommaire du Numéro 6 :


1 - Frederik POHL & Jack WILLIAMSON, Les Récifs de l'espace (The Reefs of Space, 1963), pages 2 à 58, roman, trad. Pierre BILLON, illustré par Ed EMSH

2 - Fritz LEIBER, Rodéo sidéral (A Hitch in Space, 1963), pages 59 à 69, nouvelle, trad. Jean LAVERSANNE, illustré par Gray MORROW *

3 - Philip K. DICK, La Voix venue du ciel (What the Dead Men Say, 1964), pages 70 à 119, nouvelle, trad. Pierre BILLON, illustré par Virgil FINLAY

4 - Damon KNIGHT, Les Touristes de la galaxie (The Big Pat Boom, 1963), pages 120 à 127, nouvelle, trad. Arlette ROSENBLUM, illustré par H. R. VAN DONGEN

5 - Willy LEY, Le Grand phénomène sibérien, pages 128 à 135, article

6 - Robert F. YOUNG, Dans les anneaux de Saturne (In Saturn's Rings, 1964), pages 136 à 157, nouvelle, trad. Michel DEMUTH, illustré par Stephen LAWRENCE  *


* Nouvelle restée sans publication ultérieure à ce numéro.


Frederik Pohl et Jack Williamson partent d'une hypothèse, comme quoi la vie préexisterait à l'apparition des astres, qu'elle fertiliserait à partir de formes de vie nées dans l'espace. De là, ils tissent ensemble une histoire où des chercheurs réduits en esclavage par une Machine toute puissante seraient amenés à débusquer les mécanismes de la formation du vivant dans Les récifs de l'espace, zones interstellaires ou foisonnent des sortes de coraux cosmiques. Tout cela au travers du parcours d'un chercheur en mathématiques bien naïf ne songeant, quoi qu'il lui en coûterait, qu'à gagner sa liberté en échange de sa servilité envers la Machine. Agréable, bien qu'un peu bavard, on attendra la suite pour le prochain numéro.


Un astronaute fait des réparations sur son astronef en sortie spatiale quand des circonstances tragi-comiques font redémarrer l'engin. S'ensuit un Rodéo sidéral pour lui permettre de remonter à bord. Fritz Leiber nous livre ici un petit récit un peu gratuit mais court et plaisant.



"A rebrousse temps" pour l'idée qu'un mort puisse revenir parmi les vivants, "Ubik" pour la persistance de la pensée d'un mort qui s'impose aux vivants par tous les moyens possibles et impossibles, "Le Dieu venu du Centaure" pour cette jeune femme en proie aux drogues et de retour d'un coin somme toute pas si éloigné de notre propre Système Solaire… On retrouve les thèmes qui seront déployés dans ses futurs romans parmi les plus audacieux dans La voix venue du ciel, une novella de Philip K. Dick. On a encore à faire à un Dick matérialiste, et donc qui finit par expliquer "rationnellement" et scientifiquement tous les errements de la réalité, mais l'on ne peut que saluer le métier déjà sûr de ce futur grand écrivain de science-fiction. Cette novella sera retraduite et paraîtra par la suite sous le titre "Ce que disent les morts".


Autre monde, autres mœurs... pourrait-on croire. Mais dans les mondes de Damon Knight, et avec Les touristes de la galaxie, la farce est une pratique universelle. 



Un vieil astrogateur, rendu plusieurs fois centenaire du fait de ses voyages spatiaux, est au crépuscule de sa carrière de convoyeur pour la richissime famille Christopoulos, qui vivent comme des dieux sur leur satellite Dans les anneaux de Saturne. Le vieil homme a toujours ignoré ce qu'il convoyait, mais il sait qu'il s'agit d'un dernier chargement - la planète source ayant subi un cataclysme. Habilement, Robert F. Young nous entraîne dans le sillage d'une fidélité exemplaire qui n'est ni dévotion ni adoration.


Côté "rubriques" et "Pour votre information", Willy Ley nous en apprend davantage sur l'explosion sibérienne de 1908.

12 novembre, 2025

Fiction n°130 – Septembre 1964

Un numéro équilibré entre SF et Fantastique, avec une offre généreuse en récits courts. On pourra y apprécier J. T. McIntosh décidément devenu très taquin, à l'instar de Robert F. Young. Même Gérard Klein nous chatouille avec un récit à chute. Etonnamment, c'est le (d'habitude) facétieux James White qui est ici le plus sérieux.

Dans les profondeurs de la Fiction !


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Sommaire du Numéro 130 :


1 - (non mentionné), Nouvelles déjà parues des auteurs de ce numéro, pages 6 à 6, bibliographie

NOUVELLES


2 - J. T. McINTOSH, Sacrifice humanoïde (Humanoid Sacrifice, 1964), pages 7 à 30, nouvelle, trad. Christine RENARD *

3 - Gérard KLEIN, Magie noire, pages 31 à 43, nouvelle

4 - Robert F. YOUNG, Rapport sur le comportement sexuel des habitants d'Arcturus 10 (Report on the Sexual Behavior on Arcturus X, 1957), pages 44 à 55, nouvelle, trad. Christine RENARD

5 - James WHITE, Le Pilote (Fast trip, 1963), pages 56 à 94, nouvelle, trad. René LATHIÈRE *

6 - Jack SHARKEY, La Proie (Trade-in, 1964), pages 95 à 107, nouvelle, trad. René LATHIÈRE

7 - Daniel MEAUROIX, Quel cataclysme ?, pages 108 à 113, nouvelle

8 - Robert M. jr. GREEN, Les Habitants de nulle part (No Place Like Where, 1964), pages 114 à 126, nouvelle, trad. Pierre BILLON

9 - G. O. DUVIC, Irma, pages 127 à 134, nouvelle *

10 - Philip WINSOR, Maman (Mama, 1963), pages 135 à 137, nouvelle, trad. Michèle SANTOIRE *

CHRONIQUES


11 - Jacques VAN HERP, Les Mondes défunts et les mondes cachés, pages 139 à 151, article

12 - Roland STRAGLIATI, Livres de cinéma, pages 153 à 157, critique(s)

13 - Pierre HALIN, Notes de Lecture, pages 159 à 159, critique(s)


* Nouvelle restée sans publication ultérieure à ce numéro.


Fiction évoque un "nouveau" J. T. McIntosh ; en effet, on a un peu la sensation de lire du Robert Sheckley avec cette histoire de réparateur de coordinateur de régulation météorologique sur une planète étrangère (et on se rappellera des aventures de Cergue et Arnaud). Avec intelligence, McIntosh mêle dans Sacrifice humanoïde : logique spécieuse (penser comme une machine) et pillage colonial (un terrien capturé et maintenu en hibernation avant l'entrée de la Terre dans la Fédération galactique…) ; bref, une nouvelle légère et plaisante.


"Peut-être Dieu accorde-t-il aux physiciens ce qu’ils attendent, et aux croyants ce qu’ils désirent, pourvu qu’ils y croient avec assez de force." S'en remettant par désespérance à faire de la magie pour relancer leur vaisseau en panne, trois naufragés vont découvrir à leurs dépend qu'il est un temps pour tout, pour la croyance comme pour la science. Magie noire est bon récit signé Gérard Klein.


Parodiant le rapport Kinsey sur les mœurs sexuelles des habitants des Etats-Unis, Robert F. Young propose son Rapport sur le comportement sexuel des habitants d’Arcturus 10une petite histoire un poil machiste, du moins qui joue sur ce cliché du héros sauvant l'héroïne du péril. Mais l'ensemble reste bon enfant.


Après Gérard Klein et ses naufragés un poil infantiles, Le pilote ferait presque figure de documentaire tant il brille par son réalisme et son sérieux. Peut-être James White y est-il trop sérieux, mais ces passagers d'une semi-épave initialement partis pour un voyage Terre-Mars demeurent de bien courageux survivants.

On ne voit pas venir la chute au propre comme au figuré de La proie, histoire d'homme frappé par une sénescence prématurée. Un conte cruel de Jack Sharkey, malgré un arrière-goût mysogine.


On repensera inévitablement à la nouvelle de Dino Buzzati "Il était arrivé quelque chose" (in Fiction n°80) à la lecture de Quel cataclysme ?. Là aussi, un train semble se précipiter vers le foyer d'une catastrophe, et personne n'en veut rien dire, laissant le protagoniste dans la cruelle ignorance du péril vers lequel il se précipite. Daniel Meauroix (Dorémieux servi que par lui-même) va cependant un peu plus loin que son homologue italien, mais sans rien dévoiler au final.


Jusqu'où doit-on accepter l'anonymat volontaire des grands ensembles, où surnage l'impression de vies interchangeables ? Dans sa parodie des grands thèmes de la S.F., Marcel Gotlib imaginait un homme persuadé d'avoir pénétré dans un monde parallèle, alors qu'il s'était tout bonnement trompé d'appartement. Dans Les habitants de nulle part, de Robert M. Green, c'est l'inverse, mais cela est tout aussi cocasse… Pour ce qui est de l'auteur : " Cette signature est apparue dans The Magazine of Fantasy and Science Fiction de 1964 à 1967, au rythme d’une fois par an." (Source : "Histoires de la quatrième dimension - Livre de Poche 1983). Il s'agit d'un auteur canadien selon BDFI.



Irma est une histoire de justice immanente construite en deux temps. On pourra apprécier le scénario mais la technique est encore à parfaire. Malgré son travail de titans et sa minutie de fourmis, la Database BDFI crédite cette nouvelle de G. O. Duvic au bénéfice de Patrice Duvic - auteur, journaliste et anthologiste de SF et de Fantastique (on lui doit beaucoup de "Livres d'or" chez Pocket et la série "Asimov présente"). Il n'en est rien en réalité : Patrice Duvic ne publiera sa première nouvelle, "La route illustrée", qu'en 1965, dans le n°13 de la revue Lunatique. G. O. Duvic est en fait le pseudonyme d'un romancier et auteur de chansons. - auteur de romans policiers sous son nom véritable et sous les pseudonymes Maurice Lambert et Go Wilcox. (source BNF).

Pour finir : avec Maman, nous observons l'entrée d'un nourrisson dans le langage. Philip Winsor  (professeur de lettres à l’université de Columbia, dixit Fiction) induit qu'un autre savoir hors des mots préexiste à cela, mais qui est chassé par l'incursion de la langue.


05 novembre, 2025

Fiction n°129 – Août 1964

Dans ce numéro d'été 1964, pour une fois, ce sont les auteurs anglo-saxons qui présentent les textes les plus rares : Evelyn E. Smith ou Ron Goulart, ainsi que les plus furtifs John Anthony West ou Russell Kirk... On appréciera une magnifique nouvelle de J. G. Ballard qui commence à trouver ses thèmes propres.

Charmant village de Fiction !

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Sommaire du Numéro 129 :


1 - (non mentionné), Nouvelles déjà parues des auteurs de ce numéro, pages 6 à 6, bibliographie


NOUVELLES


2 - J. G. BALLARD, La Forêt de cristal (The Illuminated Man, 1964), pages 7 à 35, nouvelle, trad. René LATHIÈRE

3 - Evelyn E. SMITH, Cher petit Gregory (Little Gregory, 1964), pages 36 à 56, nouvelle, trad. Michèle SANTOIRE *

4 - Bryce WALTON, Les Gardiens de la Paix (The Peace Watchers, 1964), pages 57 à 73, nouvelle, trad. Pierre BILLON *

5 - Ron GOULART, Un justicier trop parfait (Into the Shop, 1964), pages 74 à 84, nouvelle, trad. René LATHIÈRE *

6 - Robert LORY, Rendez-vous à dix heures (Appointment at Ten O'Clock, 1964), pages 85 à 90, nouvelle, trad. Pierre BILLON *

7 - Christine RENARD, De profundis, pages 91 à 101, nouvelle

8 - BELEN, Lorsque la femme parée..., pages 102 à 105, nouvelle

9 - Russell KIRK, Le Manoir de Sorworth (Sorworth place, 1962), pages 106 à 126, nouvelle, trad. René LATHIÈRE *

10 - John Anthony WEST, La Fiesta de Managuay (The Fiesta at Managuay, 1961), pages 127 à 140, nouvelle, trad. Christine RENARD *

CHRONIQUES


11 - COLLECTIF, Ici, on désintègre !, pages 141 à 151, critique(s)

12 - Jacques GOIMARD, L'Écran à quatre dimensions, pages 153 à 155, article

13 - Roland STRAGLIATI, Notes de lecture, pages 157 à 159, critique(s)


* Nouvelle restée sans publication ultérieure à ce numéro.


La forêt de cristal est une fort belle nouvelle de J. G. Ballard, qui entame sa série de mondes catastrophés, après "Le monde englouti" paru cette même année. Ici, c'est l'arrêt progressif de l'écoulement du temps qui cristallise peu à peu notre planète, dans un foisonnement de jeux de lumières prismatiques sans cesse rappelés. Pour une fois, le traducteur René Lathière ne s'en sort pas trop mal, et l'on peut supposer que le style travaillé de Ballard l'aura fait progresser.

 

On s'amuse toujours beaucoup avec le ton faussement naïf qu'adopte Evelyn E. Smith. Ici, une gouvernante est enrôlée pour veiller sur le Cher petit Gregory, un enfant...qui n'a rien d'enfantin. Jouant un peu avec les codes du fantastique et ceux de la science-fiction, on n'est jamais dupes mais on s'y laisse prendre avec humour.


C'était avec appréhension que nous avions abordé la lecture de la nouvelle intitulée Les Gardiens de la Paix, les deux précédentes de Bryce Walton ayant été difficiles à apprécier. Ici, on est en droit de se laisser aller à goûter à cette histoire de société humaine (très "american way of life") d'où toute émotion négative est chimiquement bannie. Tout y repose sur le conditionnement en Clinique et la surveillance des Gardiens de la Paix, avec l'oubli en couvercle sur la marmite de l'inconscient. Pour filer la métaphore, la soupe est bonne mais passablement commune, et Walton insiste trop et sans aucun style sur les quelques ingrédients communs qu'il semble penser avoir découvert. Bref, son eau chaude rappellera de meilleures œuvres : "Le piéton" ou certains passages de "Fahrenheit 451" de Ray Bradbury, ou les futurs "Rapport minoritaire" de Philip K. Dick ou le film "Demolition man" et son monde d'où la violence est bannie.


Ron Goulart, lui, possède ce qui manque à Walton : une bonne dose d'humour. Dans Un justicier de trop, la surveillance et l'exercice du maintien de l'ordre sont confiés à des machines capables d'initiatives. Les policiers chargés d'être les agents principaux d'une enquête se retrouvent en fait obsolètes et simples subalternes. Ce ne devrait pas être le cas, mais ces prises d'initiatives de la machines sont ici perçues comme des dysfonctionnements monomaniaques - et c'est là que réside tout l'humour de Goulart : sans pousser son anticipation jusqu'au point de singularité, il constate que l'homme a construit lui-même les instruments de son déclassement en escomptant sur une infaillibilité mécanique. Mais sans doute que le maintien de la loi et de l'ordre, et l'exercice de la justice, réclament davantage que cela.


Comment aimer un jour sans fin, ou plutôt une boucle du temps revécue sans relâche ? Rendez-vous à dix heurespetite histoire au style forcément répétitif mais bien menée par Robert Lory, nous propose une résolution.


Riche idée de Christine Renard que cette histoire de jeune fille qui se fait passer, De profundis, pour une morte afin de faire croire à un fantôme… Jusqu'à ce que le fantôme lui apparaisse ensuite. On retrouve les thèmes et les ambiances favoris de cette autrice.


Lorsque la femme parée… de Belen, n'intéressera peut-être que les amateurs de grivoiseries.



Comme chez Henry James, on ne sait jamais ce qu'il faut croire en abordant Le manoir de Sorworth. La narration de cette histoire de manoir écossais hanté peut prêter à sourire, et malgré une fin un peu fade, l'ambiance que dresse Russell Kirk peut emporter les plus sensibles des lecteurs.


La fiesta de Managuay nous emporterait bien, si ce n'était une fin trop abrupte et qui désole un peu cette ambiance de carnaval de mendiants et d'éclopés toute sud-américaine dans son surréalisme concret. Dommage, on avait bien apprécié les nouvelles précédentes de John Anthony West.



En bonus, nous vous proposons de découvrir un second roman de John Taine, après "Germes de vie" qui constituait l'une de nos toutes premières publications. Comme de coutume, la critique de Demètre Ioakimidis est appropriée, donne envie de lire le roman, mais sans se laisser aller à la complaisance.


Notre bonus !

John Taine - L’étoile de fer

Eric Temple Bell, qui naquit en Écosse en 1883 et mourut aux États-Unis en 1960, enseigna les mathématiques à l’Institut de Technologie de Californie, et publia plusieurs ouvrages sur cette science ainsi que sur son histoire. Sous le pseudonyme de John Taine, il écrivit un bon nombre de romans et quelques nouvelles se rattachant à la science-fiction. Cette Étoile de fer, ainsi qu’il est précisé dans la présente édition, parut pour la première fois en 1930.

Il est assez remarquable que ce mathématicien ait principalement été attiré, dans ses œuvres d’imagination, par les sciences biologiques. Comme Germes de vie, précédemment paru dans la même collection, c’est à cette science que se rattache cette Étoile de fer. Comme le titre l’indique, c’est un débris céleste qui est au centre de l’action – ou, plus exactement, du mystère : une météorite de composition inhabituelle, tombée en Afrique équatoriale, provoque d’étranges mutations par son rayonnement. Les êtres humains, sous son influence, suivent une évolution à rebours, devenant des singes, perdant la plus grande part de leur intelligence alors qu’ils ne conservent que l’instinct. C’est l’histoire de l’expédition qui découvrira l’explication qui forme la plus grande partie du livre. Le récit est mené avec le métier que les anglo-saxons désignent de l’adjectif compétent, et c’est effectivement ainsi que l’on peut qualifier l’auteur. Il tire un emploi logique et cohérent d’un thème valable, et le présente à son lecteur de manière à éveiller sa curiosité dès les premières pages. Le personnage de l’ancien missionnaire Swain, chez lequel l’homme paraît encore lutter avec le singe, est dessiné avec beaucoup de fermeté.

Mais le roman trahit son âge, indubitablement. Cela tient simplement au fait que la science-fiction a évolué depuis que Bell-Taine a écrit cette Étoile de fer. En 1930, le thème des mutations était moins familier que de nos jours, et le lecteur de 1964 ne peut s’empêcher de trouver que l’auteur « tire à la ligne » : l’explication des divers mystères présentés lui apparaît en général beaucoup plus vite qu’aux personnages, et les marches que l’auteur impose à ceux-ci à travers les forêts équatoriales fatiguent ceux qui lisent au moins autant que les membres de l’expédition. Il faut remarquer, en outre, qu’un préjugé racial certain – il est souvent question des Africains sous les termes de « brutes » et de « sadiques » – n’est pas fait pour gagner la sympathie du lecteur.

À relever, à l’actif, la très bonne traduction de Christine Renard. Celle-ci possède deux qualités que l’on ne rencontre pas toujours chez ses confrères : elle connaît l’anglais, et elle aime la science-fiction.

Demètre IOAKIMIDIS

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