07 février, 2024

Fiction n°058 – Septembre 1958

Beaucoup de nouveaux auteurs pour ce numéro 58, le seul à faire coïncider son année de parution et sa numérotation. Plus sérieusement, on appréciera de (re)découvrir des récits - restés inédits depuis - de Shirley Jackson ou de C.S. Lewis, et un très bon article de Jacques Sternberg.

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Sommaire du Numéro 58 :


NOUVELLES


1 - Robert A. HEINLEIN, Oiseau de passage (The Menace from Earth, 1957), pages 3 à 27, nouvelle, trad. Roger DURAND

2 - C. S. LEWIS, Le Contingent de secours (Ministering Angels, 1958), pages 28 à 37, nouvelle, trad. Roger DURAND *

3 - Joan VATSEK, Le Rival (The duel, 1958), pages 38 à 51, nouvelle, trad. Roger DURAND *

4 - Marcel BATTIN, Un jour comme les autres, pages 52 à 53, nouvelle

5 - Shirley JACKSON, Les Présages (The omen, 1958), pages 54 à 67, nouvelle, trad. Roger DURAND *

6 - Rog PHILLIPS, Plante à tout faire (Love Me, Love My -, 1958), pages 68 à 81, nouvelle, trad. Arlette ROSENBLUM *

7 - Jean-Claude PASSEGAND, L'Amoureux du soleil, pages 82 à 86, nouvelle *

8 - René BARJAVEL, Béni soit l'atome, pages 87 à 98, nouvelle

9 - Robert M. COATES, Les Voix de l'esprit (A parable of love, 1957), pages 99 à 111, nouvelle, trad. Catherine GRÉGOIRE *

10 - Jean-Jacques OLIVIER, La Fin d'un monde, pages 112 à 114, nouvelle *

11 - Poul ANDERSON, Les Arriérés (Backwardness, 1958), pages 115 à 125, nouvelle, trad. P. J. IZABELLE 

CHRONIQUES


12 - Jacques STERNBERG, Le Monde de demain à l'exposition de Bruxelles, pages 127 à 133, article

13 - COLLECTIF, Le Conseil des spécialistes, pages 134 à 134, critique(s)

14 - Jacques BERGIER & Alain DORÉMIEUX & Gérard KLEIN & Igor B. MASLOWSKI, Ici, on désintègre !, pages 135 à 141, critique(s)


* Nouvelle restée sans publication ultérieure à ce numéro.

Oiseau de passage est une charmante nouvelle au ton très vivant. Robert Heinlein décrit avec intelligence quelques particularités de la vie dans une base lunaire.

Comme le présente la revue, C.S. Lewis répond au problème supposé des hommes laissés sans femmes dans une mission martienne au long cours, dans Le contingent de secours. Si ses arguments sont sensés, il ne faudra pas oublier de considérer les personnages comme de simples représentants d'eux-mêmes et non comme les porte-paroles de leurs genres respectifs. Alors on pourra suivre cette histoire avec humour.

Un brin d'horreur psychologique dans Le rival  et une histoire de revenant tout de même assez classique quoi qu'en disent les rédacteurs de la revue. Ce sera la seule nouvelle publiée dans Fiction pour Joan Vatsek, connue plutôt pour des nouvelles de littérature dite "blanche".

Il y a du Julia Verlanger chez Marcel Battin, auteur nouveau venu surtout connu pour ses traductions. Un jour comme les autres est un récit cruel fait par la "génération 2" post-apocalyptique.

Hormis l'usage des plantes pour renouveler l'oxygène dans un astronef, Plante à tout faire  par Rog Phillips, d'un ton  plus polar que SF, n'apporte pas grand chose de neuf.

L'amoureux du soleil, par le jeune Jean-Claude Passegand, est un joli conte plein de poésie, dans le vrai sens du merveilleux, c'est-à-dire fascinant et effroyable à la fois.

Dans Les Présages, et pour une fois, Shirley Jackson demeure légère et même humoristique - non sans une représentation des mécanismes du monde qui frôlent la sorcellerie. Cette différence de ton explique peut-être que la nouvelle, très bien ficelée au demeurant, n'ait pas été reprise dans les futures anthologies de l'autrice.

On reconnaîtra à René Barjavel le mérite d'avoir su écrire de la véritable science-fiction quand peu de ses contemporains s'y intéressaient, bien qu'il n'échappe pas à certains travers avec ce Béni soit l'atome (imaginer l'avenir uniquement comme une amplification technologique, se figurer une société à la fois stagnante et à la conquête de l'espace, surjouer les cataclysmes humains comme si le sort de l'univers en dépendait...). On pourra lui préférer Pierre Boulle, dans un registre similaire.

En marge, vous pouvez retrouver René Barjavel (sans filtre, ou presque) en 1958, interviewé par Pierre Desgraupes, dans le cadre de l'émission "Lectures pour tous" (09 juillet 1958),  à l'occasion de la réédition de son "Voyageur imprudent" chez Denoël (Présence du futur) : SUR LE SITE de l'INA - ICI

On repensera à "La tentation cosmique" de Roger Sorez à la lecture de Les voix de l'esprit - même avanie du protagoniste principal qui se découvre un "plus" par rapport à ses semblables, même cynisme, même ascension fulgurante dans le monde des affaires, et mêmes déconvenues. Le piège de l'amour ne lui est pas non plus épargné. Un beau récit de Robert M. Coates, quoi qu'il en soit, dont ce sera pour lui aussi la seule incursion dans la revue.

Jean-Jacques Olivier, qu'on a déjà lu, gagne à être concis et le démontre dans La fin d'un monde, qui frise l'absurde et déploie l'ironie.

Les arriérés travaille un cliché de la SF : celui des espèces plus évoluées que la nôtre. Le contexte devient habituel : un Empire galactique est sur le point de faire entrer la Terre dans son conglomérat. Mais ici, Poul Anderson envisage que la supériorité intellectuelle d'une espèce diffère de celle des individus qui la composent, tout comme l'espèce humaine n'est pas constituée que de Newton ou d'Einstein. Bien que tournant un peu court, le propos est intéressant.

Un texte magistral de Jacques Sternberg Le Monde de demain à l'exposition de Bruxelles, qui, en plus d'avoir un regard aiguisé sur les promesses de son époque, nous éclaire d'aphorismes prémonitoires sur ce qui est devenu notre quotidien. Tout est dit pour notre temps ; par exemples :

Comme on le voit, la science-fiction est une littérature placide, mais un sport violent. Que penser des émotions qu'elle nous réserve quand elle ne sera plus fiction ?

Ou encore : 

Inutile de tenter de visiter ce dédale universel en un jour : c'est fatigant et inutile. Le tour du monde en vingt-quatre heures appartient aux avions à réaction, pas aux piétons. Et, dans ce monde ultra moderne du presque XXIe siècle, aucun véhicule ne dépasse la vitesse de 10 km à l'heure. C'est exactement ce qui attend notre siècle si les autos continuent à proliférer comme les lapins.

On notera une petite pique  (?) au passage envers la revue Satellite nouvellement créée, à l'occasion des descriptions du Luna Park et de ses attractions  :

Satellite : Métier (sic) extrêmement spectaculaire, très brutal, destiné aux amateurs de sensations fortes. Les Voitures tournent sur un axe à une vitesse très élevée et se détachent brusquement pour s'engouffrer dans un tunnel. (Comme la revue du même nom, sans doute ?)

Par ailleurs, dans La revue des livres, la critique de Gérard Klein au sujet de la dernière parution de Willy Ley (vulgarisateur scientifique qu'on a pu suivre dans Galaxie)  est fort instructive.


RÊVES D'INGENIEURS. Willy Ley, Marne, collection « Découvertes ».

On sait que Willy Ley est l'un des journalistes scientifiques les plus en vue aux U.S.A. Ses articles dans « Astounding Science Fiction » valent régulièrement à cette sérieuse revue un courrier abondant dans lequel se mêlent félicitations et injures. C'est que Ley s'efforce toujours de décrire les techniques de l'avenir et qu'il n'est rien de plus âpre au monde que les disputes d'ingénieurs à propos de leurs travaux, si ce n'est les colloques scientifiques.

Ces « Rêves d'ingénieurs » s'ouvrent sur un cauchemar : celui de la disparition des sources classiques d'énergie, le charbon et le pétrole. Il nous a semblé que Willy Ley était un peu pessimiste à ce propos, eut égard aux rapports des économistes et des géographes ; mais nous pouvons sans peine admettre son point de départ, à savoir que des réserves, si importantes soient-elles, sont limitées et qu'un beau jour on en verra le bout. 

Et après ? Eh bien, après, il faudra recourir à d'autres sources d'énergie, plus originales celles-là, et selon toute vraisemblance inépuisables, celles que nous offrent les éléments. Willy Ley décrit dans son ouvrage les études et les réalisations qui ont été entreprises et dans certains cas menées à bien afin d'employer l'énergie des volcans, celle du soleil, la puissance de la mer, et celle enfin de l'océan atmosphérique dans lequel nous baignons. Dans l'état actuel des choses, l'énergie des volcans et celle du vent ont été largement exploitées. Le soleil et la mer sont moins bien partagés, mais le stade des expériences est largement dépassé.

On notera que trois au moins de ces mines d'énergie ne font qu'employer de façon détournée l'énergie solaire, la question n'étant pas résolue en ce qui concerne l'énergie géo-thermique.

Un fait significatif sur le plan économique est que les pays qui ont déjà développé ces sources d'énergie sont pauvres en ressources classiques. Il se pourrait bien qu'ils se trouvent ainsi à l'avant-garde du progrès et que leur pauvreté ne se mue finalement en abondance. Ainsi l'Italie, qui domine de mieux en mieux la puissance parfois explosive des volcans. Ainsi la France, qui bien que mieux partagée, gagnerait à économiser son charbon en utilisant les ressources de la mer ou du vent. Peu ou pas de travaux de ce genre aux États-Unis où les ressources classiques, pétrole et charbon, sont, dans l'état actuel des choses, d'un prix de revient moins élevé.

Toujours est-il que les bouleversements politiques et économiques que pourrait apporter la mise en valeur de ces « nouvelles » richesses seraient considérables : le traditionnel déséquilibre entre pays riches et développés, et pays pauvres et sous-développés pourrait se renverser.

On notera pourtant que tous ces travaux sont colossaux et qu'ils exigent des investissements considérables, correspondant bien par là à des rêves d'ingénieurs, désireux de rebâtir la carte du monde, de réédifier la structure des côtes et de transformer la surface aride des déserts en gigantesques cellules photo-électriques. Il est peu douteux, cependant, qu'ils soient menés à bien un jour ou l'autre, tant leur élaboration est aujourd'hui poussée. Par leur immensité même, ces projets appartiennent bien à ce grandiose avenir que nous envisageons tous plus ou moins confusément, et avec plus ou moins de sérénité.

À noter que Willy Ley n'accorde aucune place dans son livre à l'énergie atomique. Sans doute parce qu'on en a déjà beaucoup, et peut-être même trop, parlé. Peut-être aussi parce qu'elle est beaucoup moins rentable qu'on ne l'a dit, et à coup sûr extrêmement délicate à manipuler, sinon dangereuse. Les volcans, le soleil, la mer et la tempête sont de vieux amis, ou de vieux ennemis, de l'homme. Il sait qu'il peut leur faire confiance.

G. K. 

Rapport du PreFeG (Janvier 2024)

  • Relecture 
  • Corrections orthographiques et grammaticales 
  • Vérification du sommaire 
  • Ajout du 4ème de couverture (publicité pour le Rayon Fantastique)
  • Vérification des casses et remise en forme des pages de titre 
  • Note (4) ajoutée. 
  • Vérification et mise à jour des liens internes 
  • Mise au propre et noms des fichiers html 
  • Mise à jour de la Table des matières
  • Mise à jour des métadonnées (auteurs, résumé, date d'édition, série, collection, étiquettes)

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Robert HEINLEIN
C.S.LEWIS

A suivre : Fiction n°059.

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