15 juin, 2022

Fiction n°017 – Avril 1955

Diableries et possessions à la française accompagnent la pure science-fiction que propose la fin du cycle "Une chance sur..." de J. T. McIntosh.

Une pirouette avec ou sans gravité ? 

Le clic de souris pèse lourd...

Pour cette deuxième partie de "Brebis galeuse", rien n'est acquis mais la morale est sauve. McIntosh conclue sa trilogie sur l'espoir en l'amour.

Côté diableries, une nouvelle plutôt drôlatique sur les agissements d'un livre aux vertus diaboliques (et un retour de flamme pour l'envoyeur...), avec "Exemplaire de presse", par ANTHONY BOUCHER. Les français ne sont pas en reste : "Caacrinolaas", par JEAN-LOUIS BOUQUET, se taille la part belle avec une longue histoire au fantastique discret, dans cette ambiance baroque de carnaval et de masques chère à l'auteur. "Le ballet", par ALAIN DORÉMIEUX, propose à son tour une histoire de possession et de dérèglement de l'entendement. On notera que Dorémieux commence à affiner son style.

 Ce numéro 17 de Fiction nous propose aussi "Les parias", par POUL ANDERSON, une très belle nouvelle, témoignant des profondes réflexions scientifiques de Anderson sur les paradoxes des voyages spatiaux, et sur la longévité augmentée des voyageurs de l'espace qui en fait des inadaptés à un retour à la société des sédentaires. On retrouvera 20 ans plus tard cette idée exploitée de nouveau dans le poignant "La guerre éternelle" de Joe Haldeman.


Sommaire du Numéro 17 :

NOUVELLES

1 - J. T. McINTOSH, Brebis galeuses (II) (One Too Many, 1954), pages 3 à 34, nouvelle, trad. (non mentionné)

2 - Anthony BOUCHER, Exemplaire de presse (Review Copy, 1949), pages 35 à 44, nouvelle, trad. (non mentionné)

3 - Michel MARLY, Un coup en vache..., pages 45 à 46, nouvelle

4 - Poul ANDERSON, Les Parias (Ghetto, 1954), pages 47 à 77, nouvelle, trad. (non mentionné)

5 - Jean-Louis BOUQUET, Caacrinolaas, pages 78 à 110, nouvelle

6 - Alain DORÉMIEUX, Le Ballet, pages 111 à 115, nouvelle

 

CHRONIQUES

7 - Jacques BERGIER & Igor B. MASLOWSKI, Ici, on désintègre !, pages 119 à 124, critique(s)

8 - F. HODA, Un tableau fantastique, pages 125 à 126, article

 

Rapport du PreFeG (Mois 20aa)

  • Relecture
  • Corrections orthographiques et grammaticales
  • Mise au propre et noms des fichiers html
  • Vérification des casses et remise en forme des pages de titre
  • Mise en gras des titres in "Revue des livres"
  • Ajout des notes (4b), (6b) et (10b)
  • Vérification et mise à jour des liens internes
  • Mise à jour de la Table des matières
  • Mise à jour des métadonnées (auteurs, résumé, date d'édition, série, collection, étiquettes)

On a déjà pu lire la prose de Michel Carrouges dans les pages de Fiction. Un peu touche-à-tout, s'approchant du surréalisme mais "excommunié" du mouvement du fait de ses positions religieuses, proche de l'église mais s'intéressant aux soucoupes volantes, auteur de nouvelles de science-fiction mais romancier plutôt fantastique, l'homme est difficile à cerner tant il s'ingénie à se placer à la croisée des chemins.

Fiction cite ce mois d'avril 1955, dans ses "Glanes interstellaires", un extrait d'un de ses articles, où il traite - en donnant presque l'impression de n'y avoir jamais touché lui-même -  de cette science-fiction qui interloquait tant les critiques littéraires de l'époque.

À travers la presse.

Aux imaginatifs, aux rêveurs, aussi bien qu’aux esprits positifs et spéculatifs, recommandons la lecture du numéro de janvier de « La Table Ronde », où se trouve réunie une « somme » sur le thème suivant : « La pluralité des mondes et le mythe des soucoupes volantes ». Une série d’articles et d’études où se retrouvent notamment les signatures de Jean Cocteau, Jean Guitton, Jacques Spitz, Michel Carrouges et Robert Amadou passent en revue les différentes notions impliquées par ces problèmes, depuis la philosophie de l’univers jusqu’à la psychologie des « visionnaires ». Autant de facettes multiples et passionnantes.

Nous nous contenterons de reproduire plus spécialement un extrait de l’article de Michel Carrouges, « Les animaux célestes sont-ils plus raisonnables que nous ? », car l’auteur y traite de la science-fiction ». On y retrouve le ton d’essayiste séduisant que nous lui connaissons ; regrettons seulement qu’il ait adopté dans l’ensemble de son propos (est-ce à cause du « sérieux » de la revue ?) une attitude assez « supérieure » vis-à-vis de la S.-F., alors que de son propre aveu il s’y intéresse mieux qu’en amateur (voir l’introduction à sa nouvelle « Le cache-nez de caoutchouc », dans notre numéro 14). Nous lui laissons la parole :

Plus loin on s’aventure au-delà de la science réelle et véritable, plus on marche droit vers le contraire de la science : la spéculation mythique. On peut faire vraiment de la « science-fiction » si l’on se contente de broder sur l’application pratique de quelques inventions relativement modestes et possibles. Mais il est difficile de résister à ce grand vent de tempête de la science des atomes, des quanta, des hypergéométries et de la relativité généralisée qui a pulvérisé les données ordinaires du bon sens sur la matière, l’espace et le temps. Ces données brisées, l’imagination se trouve en face d’un monde sens dessus dessous, aussi magique que celui des plus anciens mythes ou du monde du rêve. Il y a une immense part d’imagination mythique chez Jules Verne, mais elle peut rester inconsciente et cachée dans la mesure où l’auteur se tient encore au parapet du sens commun. Il ne fait que de la pêche côtière aux merveilles. Mais avec Wells et ses successeurs, nous sommes en pleine mer. Ils ont beau se servir de machines scientifiques, c’est l’imagination pure qui tient le gouvernail et qui fonce droit vers les mondes fantastiques de toujours.

Ainsi la notion de matière est-elle complètement hagarde avec les animaux intersidéraux qu’évoquent Russel et Van Vogt. La relation de l’esprit et du corps est incroyablement subvertie avec les permutations d’esprits et de corps à travers les millénaires selon Werfel ou Hamilton.

Sans plus de peine, le héros de Burroughs, dans « Le conquérant de la planète Mars », brave toutes les barrières de l’espace en passant, par simple extase lévitante, de la Terre au monde martien. Mieux encore, le transmetteur de Murray Leinster, dans « Le dernier astronef », « vire » instantanément les corps solides d’une galaxie à une autre. Comme il n’y a aucune raison de s’arrêter en pareil chemin, les explosions (atomiques de préférence) ne tuent pas comme on le pensait, elles vous font simplement basculer dans quelque autre monde, parallèle comme dans « L’univers en folie », de Brown, ou futur comme dans celui de « Ville sous globe », d’Hamilton, de « Cailloux dans le ciel », d’Asimov, et de « Règne du gorille », de Sprague de Camp et Schuyler Miller. On ne s’étonnera pas que, poussant à peine plus loin, J.-G. Vandel imagine, dans « Frontières du vide », une Anti-Terre qui sert de séjour à nos défunts de l’autre côté de distances presque incommensurables, mais qu’on franchit allègrement en fusée.

Dans toutes ces fictions et bien d’autres, la matière, l’espace et le temps ne sont plus les dures réalités de l’expérience quotidienne, mais des jouets aux mains d’une toute-puissance infinie d’invention. Tout est possible. Les libertés de la science, ou plutôt des rêveries sur la science, égalent les libertés imaginaires des magiciens. Le levier de la machine remplace exactement la baguette magique, du même coup que la machine est l’ersatz triomphant qui se substitue à la fée. En réduisant le temps à une dimension de l’espace par une interprétation simpliste de la Relativité, on jongle avec la mort elle-même. La « science-fiction » met tout sur le même pied, le voyage dans le temps par la machine de Wells ou de quelques autres de ses émules, par la télépathie, le spiritisme ou les explosions atomiques. Le rapprochement est déjà significatif. Mais, dans tous les cas, le résultat est le même : tous les mondes communiquent dans tous les sens, par tous les moyens. Les ultimes perspectives de la science rejoignent exactement celles du mythe. La notion même d’une double pluralité des mondes disparaît dans cette subversion générale de tous les horizons.

Lovecraft, le plus délirant, mais peut-être aussi le plus lucide des visionnaires fantastiques contemporains, exprime de la manière la plus forte l’ambiguïté fondamentale d’un univers où la matière n’est plus de la matière, où le matérialisme court au-devant de la théosophie noire, où les rites de sorcellerie se conjuguent avec les dernières techniques de la science pour faire réapparaître les prodigieuses entités venues des astres il y a des millions de siècles et dans lesquelles fusionne fantastiquement la double pluralité des mondes.


 En cliquant sur les noms des auteurs de ce numéro

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J. T. McINTOSH
Anthony BOUCHER

Michel MARLY

Poul ANDERSON
Jean-Louis BOUQUET

Alain DORÉMIEUX

Publication suivante : cadeau bonus du 21 juin 2022.

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