Beaucoup d'histoires de couples dans ce numéro, vieux couples ou couples en formation, ou promis à un destin tragique, des Alices et des phénomènes inexpliqués… avec une magnifique couverture de Jean-Claude Forest pour agrémenter le tout.
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Sommaire du Numéro 70 :
NOUVELLES
1 - Ilka LEGRAND, Le Rire dans la maison, pages 3 à 20, nouvelle *
2 - Frederik POHL, Voir une autre montagne (To See Another Mountain, 1959), pages 21 à 39, nouvelle, trad. Roger DURAND
3 - Isaac ASIMOV, Alice au pays des hormones (The Up-to-Date Sorcerer, 1958), pages 40 à 53, nouvelle, trad. René LATHIÈRE
4 - Paul JANVIER, Les Invisibles (And then she found him…, 1957), pages 54 à 70, nouvelle, trad. Arlette ROSENBLUM *
5 - Jean-Jacques OLIVIER, L'Œil de Bouddha, pages 67 à 111, nouvelle *
6 - Charles FINNEY, Le Vieil homme et le désert (The Iowan's Curse, 1958), pages 71 à 85, nouvelle, trad. René LATHIÈRE *
7 - Howard FAST, Le Nœud (Of Time and Cats, 1959), pages 86 à 96, nouvelle, trad. Arlette ROSENBLUM
8 - James BLISH, Cette Terre dont les heures sont comptées (This Earth of Hours, 1959), pages 112 à 130, nouvelle, trad. Michel DEUTSCH
CHRONIQUES
9 - Gérard KLEIN, James Blish, l'intellectuel de la S.F., pages 131 à 139, article *
10 - Jacques BERGIER, La Science à l'assaut des univers parallèles, pages 141 à 142, article
11 - Albert VAN HAGELAND, Un auteur flamand de S.F., pages 143 à 143, article
12 - Jacques BERGIER, Aux frontières du possible, pages 144 à 144, chronique
* Nouvelle restée sans publication ultérieure à ce numéro.
Une nouvelle histoire d'emprise par Ilka Legrand, Le rire dans la maison, dont la victime n'a de goût que pour le superficiel. Une critique un peu légère sur les caractères centrés sur eux-mêmes, "selfish" comme on dit en anglais, rattrapés finalement par les désirs plus profonds d'autrui.
Voir une autre montagne est une étonnante nouvelle de Frederik Pohl, d'un ton nouveau pour cet auteur accoutumé au sarcasme et à la critique sociale. On y voit poindre, dans cette histoire de cerveau rendu fou par son intelligence, les prémices du formidable romancier qu'il sera par la suite.
Dans Alice au pays des des hormones, une fois exposée la possibilité d'induire chimiquement un comportement amoureux - et la drogue dite "des violeurs" n'a pas un procédé différent… - on peut s'ennuyer un peu avec les intrigues comiques d'Isaac Asimov, plus doué en matière de spéculation scientifique qu'en humoriste.
Une nouvelle signée Algis Budrys sous le pseudonyme de Paul Janvier, Les invisibles est malheureusement éventée par le résumé qu'en fait Fiction, quant à son sujet. Enfonçons le clou (attention : divulgachage) : les mutants sont parmi nous, forment une communauté, et ont la particularité d'être aussi discrets pour leur entourage que des caméléons. Mais quand une autre sorte de particularité est débusquée, comment réagit cette communauté secrète ? Roland C. Wagner reprendra cette idée d'un détective privé mutant et quasi invisible dans sa série de SF des "Futurs mystères de Paris."
On retrouve cette ambiance de voisinage hypocrite et d'Amérique un brin attardée, mâtinée de superstitions malsaines, dans Le vieil homme et le désert, par Charles G. Finney. Ici, c'est le désert de la Sonora et la frontière mexicaine qui lui sert de décor.
Le nœud est une bonne petite histoire de paradoxe temporel, par le grand littérateur qu'est Howard Fast. Fort appréciable.
Un combat de sorciers en quête d'un bijou fabuleux. Dans L’œil de Bouddha, par Jean-Jacques Olivier, on se croirait dans un film tant les images y sont précises et simples… Il y aurait de quoi en faire un petit roman d'aventures, complètement gratuit mais inepte, toutefois, sans autre intérêt que de faire s'évader un peu l'imaginaire du lecteur.
Avec Cette Terre dont les heures sont comptées, James Blish avance l'hypothèse que l'organisation des espèces obéit à des règles différentes selon qu'elles se développent au cœur ou en périphérie d'une galaxie. Mais aussi, en allant plus loin dans son propos, on constate que l'humanité en croyant développer sa foi en l'individu, n'échappe pas à l'effet d'organisation en ruche. Intéressant, bien qu'uniquement spéculatif.
Côté rubriques, on remarquera avec la Chronique scientifique une très intéressante note sur la possibilité scientifique des univers parallèles.
La chronique littéraire met en lumière l'œuvre de James Blish. Dès l'introduction, son auteur, Gérard Klein, digère sa récente déception envers Bradbury :
JAMES BLISH, L’INTELLECTUEL DE LA S. F. - par GÉRARD KLEIN
" La science-fiction est, on l’a dit et redit, une littérature collective. Les uns et les autres apportent et empruntent à cette mer d’idées. Et comme les idées précisément importent plus que leur traitement, il se crée rapidement une sorte de communauté de langage, ou plutôt une absence de style. On admire certes les trouvailles ingénieuses de nombreux auteurs, mais mises à part quelques rares exceptions, il est impossible ou presque, en matière de science-fiction, de reconnaître un écrivain au vu d’un texte. Pour une fois, la forêt masque les arbres.
Le problème est donc de savoir si une personnalité littéraire est compatible avec la vraie science-fiction, lourde d’idées et de thèmes scientifiques, brassant les mondes et les réalisations des hommes ou de leurs rivaux en un chaos qui n’est pas sans grandeur. Les écrivains que l’on oppose traditionnellement aux critiques qui font cette remarque sont loin d’être entièrement satisfaisants sous ce rapport, car ils négligent pour la plupart l’inspiration de la science, au profit de leur personnalité propre. C’est le cas de Bradbury et même de Sturgeon, par exemple. Ils se rapprochent de la littérature à mesure précisément qu’ils semblent s’éloigner de la science. Clarke n’a pu se décider tout à fait pour l’une ou pour l’autre. De là son manque de vigueur qui n’empêche pas ses réelles qualités de se manifester.
Au total, les histoires les mieux traitées sont aussi, en général, celles dont la pauvreté thématique est la plus grande. Tout se passe comme si la richesse du contenant variait en fonction inverse de celle du contenu. Qui n’a été écœuré de trouver gâchée en quelques pages une fort belle idée ? Inversement, les histoires de Bradbury par exemple, dont le talent est incontestable, témoignent en général, dans une perspective de thématique science-fictionniste, d’une grave carence imaginative.
Cela vient sans doute de ce qu’une belle idée, une idée solide, ne se laisse pas manier aussi facilement qu’un sujet rebattu, à peine transcrit en un autre langage. Une idée forme un ensemble cohérent qui ne se laisse pas facilement imposer des effets. Il est plus facile de bâtir une intrigue à partir d’un certain nombre d’effets que l’on souhaite obtenir, que de dégager les prolongements les plus spectaculaires de deux lignes extraites d’un journal scientifique.
La cause, cependant, ne paraît pas perdue. Mais elle exige une manière de culture en matière de science-fiction, c’est-à-dire une façon de penser, empruntée à d’autres, aux prédécesseurs, et qui soit devenue comme une seconde nature."
Plus loin, on notera que Klein pressent déjà ce que sera la SF des années 60.
" (…) il se peut tout simplement que nous soyons en train de passer d’une littérature à fleur de peau, à fleur de nerfs, qui a sombré déjà dans la recette ou dans la facilité, à une littérature plus fine, plus construite, plus pensée et repensée, non pas forcément logique, mais consciente, et dont le piment essentiel tienne aux idées.
Des œuvres comme celles de Blish sont peut-être les signes avant-coureurs d’une révolution déjà faite, mais dont tout le monde, même de l’autre côté de l’océan, même dans le domaine limité de la science-fiction, est en train de prendre brusquement conscience."
Rapport du PreFeG (Juillet 2024)
- Relecture
- Rares corrections orthographiques et grammaticales
- Vérification du sommaire
- Vérification des casses et remise en forme des pages de titre
- Notes (9b), (16b) et (19) ajoutées.
- Notes (2) et (11) augmentées.
- Vérification et mise à jour des liens internes
- Mise au propre et noms des fichiers html
- Mise à jour de la Table des matières
- Mise à jour des métadonnées (auteurs, résumé, date d'édition, série, collection, étiquettes)
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