07 décembre, 2022

Fiction n°028 – Mars 1956

Des rares et des classiques pour ce n°28 !

 

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Sommaire du Numéro 28 :

NOUVELLES

 

1 - Poul ANDERSON, La Patrouille du Temps (Time Patrol, 1955), pages 3 à 39, nouvelle, trad. Bruno MARTIN

2 - Charles BEAUMONT, Morts en haute fidélité (The New Sound, 1955), pages 40 à 45, nouvelle, trad. Roger DURAND

3 - Idris SEABRIGHT, Le Dieu a soif (Thirsty God, 1953), pages 46 à 53, nouvelle, trad. Alain DORÉMIEUX

4 - Ray BRADBURY, Le Désert d'étoiles (The Wilderness, 1952), pages 54 à 63, nouvelle, trad. Alain DORÉMIEUX

5 - Esther CARLSON, Et le bonheur était aux combles... (Happy landing, 1952), pages 64 à 69, nouvelle, trad. Roger DURAND

6 - P.A. HOUREY, L'Intrus, pages 70 à 81, nouvelle

7 - James BLISH, Le Livre de Vie (The Book of Your Life, 1955), pages 82 à 93, nouvelle, trad. Jean de KERDÉLAND

8 - Charles HENNEBERG, La Sentinelle, pages 94 à 106, nouvelle

CHRONIQUES


9 - Jacques VAN HERP, Maurice Renard, scribe de miracles, pages 107 à 110, article

10 - Jacques BERGIER & Igor B. MASLOWSKI, Ici, on désintègre !, pages 111 à 113, critique(s)

11 - F. HODA, Marguerite de l'ennui, pages 117 à 119, article

12 - Alain DORÉMIEUX, Éditions de Luxe, pages 121 à 121, critique(s)

13 - Alain DORÉMIEUX, La Critique des revues, pages 123 à 123, critique(s)

14 - COLLECTIF, Courrier des lecteurs, pages 125 à 126, article

"(L')un des meilleurs auteurs de S.F. tout court à l’heure actuelle : Poul Anderson" (ainsi que l'introduit la revue, excusez du peu et notons au passage que l'appellation S.F. commence à gagner du terrain) ouvre le bal avec une de ses nouvelles principales, La patrouille du temps, qui ouvrira le champ à bien d'autres nouvelles sur le sujet de la responsabilité des voyageurs du temps et des dangers des paradoxes temporels, tant chez Anderson que chez d'autres auteurs, et les bédéphiles francophones songeront inévitablement à Valérian et Laureline, la série de Mézières et Christin (Dargaud). Et Fiction de conclure son panégyrique : " Le space-opera, c’est excellent ; mais pour les vraies péripéties flambantes, assaisonnées de paradoxes intellectuels et de saisissants contrastes historiques, qu’on nous donne cette plus rare forme d’art : le « time-opera » !" Jolie formulation.

Morts en haute fidélité (The new sound) par Charles Beaumont (1955) est une nouvelle bien morbide, mais où l'on peine malheureusement à s'intéresser au sort du personnage principal. On classera l'histoire dans ces nouvelles souvent du genre horreur fantastique qui tente de digérer toute nouvelle technologie, ou tout du moins récente, par l'évocation de ses applications les pires ou les plus malveillantes.

Charles Beaumont sera principalement scénariste (on lui doit quelques épisodes de la Quatrième Dimension, et l'adaptation de L'affaire Charles Dexter Ward de Lovecraft pour le film de Roger Corman "La malédiction d'Arkham" -1963), mais fera une courte carrière et décèdera des complications d'une encéphalite chronique à l'âge de 38 ans. Des auteurs de ses amis comme Chad Oliver, Jerry Sohl ou William F. Nolan l'auront souvent aidé à honorer ses contrats.

(Mise à jour : "La malédiction d'Arkham au programme de la Cinémathèque française le vendredi 09 décembre dans le cadre du Cinéma Bis. Infos ICI )

Le dieu a soif (Thirsty god) par Idris Seabright (1953) est une nouvelle étrange, très extraterrestre, qui réussit bien son pari.

Le désert d’étoiles (The wilderness) par Ray Bradbury (1952) : du Bradbury un peu suranné, mais une jolie nouvelle toutefois.

Un petit conte sur la superficialité heureuse : Et le bonheur était aux combles (Happy landing) par Esther Carlson (1952)

Une allégorie... un peu absconse cependant... C'est L’intrus par P. A. Hourey (1956).

Le livre de vie (The Book of your Life) par James Blish (1955), au ton résolument décadent, rappellera aux lecteurs de Blish une autre de ses nouvelles plus récentes : "Plus de lumière" (1970). On y notera aussi une référence au Necronomicon, le célèbre livre maudit créé par Lovecraft, qui n'avait pas en 1956 la notoriété qu'on lui connaît aujourd'hui, et devait même être encore quasiment inconnu des premiers lecteurs de Lovecraft en français (une unique et laconique référence à cet ouvrage figure dans la nouvelle "L'appel de Cthulhu", paru chez Denoël en 1954 dans le recueil "Dans l'abîme du temps".) Mais peu importe, au final ; comme le déclare, quelques pages plus loin dans la revue, Jacques Van Herp dans son article sur Maurice Renard : "Quand Lovecraft nous conte les mystères d’Arkham et de Miskatonic, la sonorité seule des noms nous engage à le suivre." 

Dans la série "planètes pièges", La sentinelle par Charles Henneberg (1956) nous offre cette S.F. mâtinée de Mythologie et d'Antiquité propre au style Henneberg. Pour en apprendre davantage sur cet (ces ?) auteur(s), vous pouvez vous référer à notre article du 14 juillet dernier : " Cadeau bonus : « La naissance des dieux » - Charles (Nathalie) Henneberg - Grand Prix Rosny Aîné du roman d'anticipation scientifique 1954".

Parmi les chroniques, on pourra apprécier particulièrement la recension de Limbo de Bernard Wolfe ; ce roman incontournable et singulier, traitant des mutilations volontaires que permet la cybernétique, sera, et c'est un comble, lui-même mutilé de près de la moitié à sa sortie en français en 1956. Il faudra attendre 1987 (après quatre rééditions successives) pour avoir enfin accès au texte intégral en français. On sourira au passage sur la catégorie A.S. (soit Anticipation Scientifique) où Igor B. Maslowski range Limbo et l'ensemble de sa chronique : il doit être le dernier à résister encore à l'appellation SF.


Fiction parle de Galaxie !

On aura noté que, tout au long des précédents numéros, la rédaction de Fiction prend bien soin d'afficher une indifférence méprisante pour la revue concurrente "Galaxie". En général, on y fait comme si la revue n'existait pas, quelquefois on y affiche "en creux" ses différences fondamentales (comme, par exemple, en mettant en avant la politique de ne publier que des récits complets…).

Dans ce petit "Glane interstellaire", la revue est nommée, même si c'est par rebond, puisqu'il s'agit d'évoquer le "prix de Galaxie". Nous reviendrons sur ce Prix avec le numéro 25 de Galaxie ; en attendant, voici ces lignes - et on pourrait presque y entendre le rire sardonique du comité de rédaction de Fiction…

De quoi faire un collier…

Michel Lacre, le jeune auteur qui a remporté le prix de « Galaxie » pour sa nouvelle « Les larmes », s’est vu gratifier de perles assez fines en leur genre.

On a pu en effet lire en ces termes dans « L’Aurore », l’annonce des résultats du concours :

« Le prix Galamine, décerné à un conte de « science-fiction », a été attribué à M. Michel Logre, pour sa nouvelle « Les hommes ».

On se rappelle l'étroitesse, évoquée à travers Robert Margerit dans le Fiction n°27, des points de vue des critiques littéraires et des auteurs de littérature générale sur la science-fiction, et le sentiment que la seule (et jeune) collection "Présence du futur" chez Denoël pouvait inspirer un minimum de respectabilité. Voici une petite note de la rédaction de Fiction sur les titres à paraître en 1956 au Rayon Fantastique qui nous éclaire un peu plus sur les raisons de l'ostracisme relatif de cette collection que se partageaient pourtant les prestigieuses éditions Hachette et Gallimard.

Nouveau départ.

« Le Rayon Fantastique », après une production 1955 qui aura déçu tous les amateurs (quatre très mauvais romans américains et deux français seulement honnêtes), semble vouloir reprendre la place qui avait été la sienne auparavant. On s’en félicite, puisque entre le niveau populaire du Fleuve Noir et le niveau littéraire de « Présence du Futur », c’est la seule collection où puisse trouver place la véritable S.F. américaine de bonne qualité. Les titres annoncés pour les mois à venir sont prometteurs et laissent espérer que la série des mauvais crus a pris fin avec le médiocre G.O. Smith : « La fleur diabolique ». Après le bon « classique » de Stanley Weinbaum, « La flamme noire », la collection publiera en effet successivement un Clifford Simak : « Chaîne autour du soleil », un Isaac Asimov : « Les cavernes d’acier », un Raymond Jones : « Les survivants de l’infini » (dans une meilleure traduction, on l’espère, que celle qui a saboté « Les imaginos ») et un Jack Williamson : « Les dents du dragon » (qui fera mieux connaître cet excellent écrivain dont le roman « Les humanoïdes », paru trop tôt, était malheureusement passé presque inaperçu). Voilà qui mettra l’eau à la bouche des connaisseurs…

En dernier apéritif, la suite de la polémique ouverte par Alain Dorémieux sur la traduction de "Démons et merveilles" de H. P. Lovecraft commise par Bernard Noël. Celui-ci n'est pas en reste, puisque, en surplus du commentaire d'une lectrice, une partie de sa réponse à Dorémieux est publiée en fin de revue.

À propos d’une traduction.

Mme Elisabeth KRAMEH, à Zurich (Suisse).

Dans votre dernier numéro, à la page 113, M. Alain Dorémieux fait la critique de plusieurs livres et spécialement des traductions de l’anglais en français. Il écrit, à propos de la traduction de « Démons et merveilles » de Lovecraft :

«… Et, comme preuve, je me fais un plaisir d’épingler la plus ahurissante bourde que j’aie jamais vue sous la plume d’un traducteur : page 21, pour traduire« so long » qui veut dire adieu, M. Noël écrit littéralement : Si long, Carter, je ne vous reverrai plus… »

Il est évident que la traduction de ce M. Noël est affreuse et en même temps complètement fausse, mais la traduction donnée par M. Dorémieux est fausse, elle aussi. « So long » signifie simplement « à bientôt » ou « à tout à l’heure », et rien d’autre, et non « si long », ni même « adieu ». (« Adieu », en anglais, est naturellement « good-bye »).

Il s’agit d’une petite chose sans aucune importance, mais je trouve que, si l’on corrige un traducteur (et avec raison, certes), il faudrait le corriger par la traduction correcte et non pas donner une nouvelle version fautive.

 

Avant de répondre à la remarque de notre lectrice, nous utilisons l’occasion de reproduire un extrait de la lettre pittoresque que notre collaborateur Alain Dorémieux a reçue de M. Bernard Noël lui-même :

… Tout le monde sait que « so long »veut dire « adieu ». L’étalage de votre savoir n’étonnera donc personne. Par contre, si vous aviez été capable de lire le texte anglais, vous auriez compris que Lovecraft voulait traduire par ce mot l’épouvantable durée du supplice d’Harley Warren. Je vous prie, d’ailleurs, à l’avenir, de respecter même la ponctuation de mes contresens lorsqu’il vous plaira de les citer textuellement.

Sans doute faites-vous partie de ces gens qui ne peuvent voir un chef-d’œuvre sans le replâtrer. Je n’ai pas jugé bon d’embellir Lovecraft en lui supprimant ses adjectifs. Ses longues phrases sont capables d’en charrier des dizaines et mon français d’en faire saisir l’étrange rythme évocateur.

Nos lecteurs auront remarqué que M. Noël admet que « so long » signifie « adieu ». À priori, il semblerait placé pour le savoir, étant traducteur. Notre lectrice a cependant raison : les sens qu’elle donne sont ceux qui sont couramment admis. Mais celui, plus général, de « adieu », l’est aussi par extension. D’ailleurs, comme elle le dit elle-même, il s’agit d’une nuance sans importance.

En tout cas, si on se reporte au contexte chez Lovecraft, la signification devait bien être « adieu », puisque c’est la parole prononcée par un homme qui va mourir. La scène vécue par lui, ceci dit en passant, dure à peine quelques minutes. Mais si malgré cela M. Noël voulait traduire l’impression qu’elle avait « une épouvantable durée », pourquoi ne l’a-t-il pas fait sentir dans sa traduction ? La simple exclamation, « si long », ne rend pas le moins du monde cette idée et constitue d’ailleurs une impropriété de langage (une telle expression isolée n’existe pas, dans ce sens, dans le langage courant).

Notre collaborateur Alain Dorémieux n’en est pas moins reconnaissant à M. Noël de lui avoir ouvert les yeux sur des intentions cachées qu’il est à son honneur d’avoir su, seul entre tous, déceler. Car enfin, il faut bien le dire, puisque M. Noël tient à revenir sur la question, notre collaborateur A. Dorémieux n’est, hélas, pas le seul – soit verbalement, soit par écrit – à s’être montré sévère sur la qualité de la traduction de cet ouvrage de Lovecraft.

Rapport du PreFeG (Décembre 2022)

  • Relecture
  • Corrections orthographiques et grammaticales
  • Vérification du sommaire
  • Vérification des casses et remise en forme des pages de titre
  • Mise en gras des titres in "Revue des livres"
  • Notes (0), (1b), (2b) et (4b) ajoutées.
  • Vérification et mise à jour des liens internes
  • Mise au propre et noms des fichiers html
  • Mise à jour de la Table des matières
  • Mise à jour des métadonnées (auteurs, résumé, date d'édition, série, collection, étiquettes)

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Poul ANDERSON

Charles BEAUMONT


Idris SEABRIGHT


Ray BRADBURY
Esther CARLSON

 

James BLISH


Charles HENNEBERG
P.A. HOUREY


Jacques VAN HERP

 

A suivre : Fiction n°029...

& Anniversaire du PReFeG !

 

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